mardi 22 février 2011

Une lointaine Arcadie


"Une lointaine Arcadie" de Jean-Marie CHEVRIER est un conte sur l'humanité auprès de la nature.
Matthieu perd tout, sa femme, sa librairie, son chien et même les investissements pour sa retraite. Il décide de ne pas en rester là avec cette vie décevante mais d'en changer, de partir, d'aller en décroissance. Il se remémore un personnage familial, oncle Gerbault, ermite presque sauvage qui vivait dans la Creuse. Il fuit dans la masure et l'univers de cet homme. Une fuite mais aussi une reconstruction de l'homme... ou déconstruction pour ne pas "revenir au monde", devenir rien.

Ainsi nous suivons Matthieu vers les origines archaïques de l'homme et dans son labeur de perdre toute son humanité. Le prétexte n'est pas la conscience écologique mais bien le fait de devenir transparent, inutile, inconsistant, sans envie ni passion, juste en survivance.
Il détruit peu à peu sa fonction d'homme, ne souhaite plus à reconnu comme tel et n'accepte que par obligation juste une indication de ce qu'il est, un humain, face à ce voisin suivi à la corde par son fils, aveugle et attardé, Francis. Cela ne lui permet plus d'être intégré aux autres hommes. "Un prénom ne sert qu'à répondre et je n'ai plus à répondre de rien à personne."
Il délaisse ses relations, se ferme à la sensualité et cherche juste à revenir aux intuitions, aux astuces de survie en terrain vierge et naturel. Il ne fait que suivre le cours des jours: des travaux physiques, des promenades sans but dans la montagne, des réaménagements de solidité (et non de confort) pour la maison ou le jardin. Ce n'est pas un retour pour la nature, mais bien une envie de disparaitre, de succomber à la solitude de la nature (et non celle de la ville, des marins). L'humanité fuie est tout de même présente, brutalement éprouvée par "l'imbécilité" de l'enfant attardé et aveugle, Francis, une part d'homme, atrophié physiquement, comme lui le devient mentalement et intellectuellement.

"Cette évocation, dans la candeur passéiste de l'école de Brive, flattait l'imaginaire en faisant fi de l'inconfort, des duretés sournoises et du terrible écho de soi-même pour celui qui vit seul. Cette vie demandait probablement un esprit frustre, sans souci de culture, et s'adressait à un personnage que la guerre avait si malmené dans sa chair que cette rudesse lui paraissait douce parce qu'elle était le fruit d'un ordre naturel du monde."

Oui mais il a beau faire, sa culture littéraire le suit. Celle-là même qui sert de trame à sa décroissance: Virgile, Homère ou Beckett le stimulent, l'entourent, le confortent pour au final lui indiquer le mur.
L'entrée en nature est picturale et culturelle. Bien-sûr les animaux offrent une leçon de chose sur la vie et la mort, les plantes deviennent sources de cours de botanique. Mais la nostalgie de l'enfance, de cette part de ruralité, est devenue aussi intellectualisée, confortée par des lectures d'adolescent (Lodon, Curwood). Et la nature n'est plus, elle a perdu son côté sauvage. Même la compagnie d'une vache, ruminant des campagnes profondes, ne lui apporte qu'un semblant de sens à cette nouvelle (non-)vie. Sa démarche de décroissance découle d'une réflexion philosophique emprunte de toutes les références mythologiques aimées par Matthieu: la génisse est Io, princesse Héra changée en vache par Zeus.

Et puis les femmes reviennent dans ce silence des mots, des sensations humaines. Sonia puis Paule. La pensée de Matthieu s'enlisait, laissant la temporalité s'échapper. Les regrets des douceurs sensuelles sont là mais aussi cette invitation à réinventer un univers, comme si toute cette démarche était une erreur: des sonorités à retrouver, une musique intérieure faite d'improvisations gutturales; puis une sensation tactile, passionnelle.

Un très très beau billet, très argumenté ici, d'autres aussi savoureux ici et . Ce livre est dans la sélection du prix Landerneau 2011. Merci à Faits&Gestes.

lundi 21 février 2011

Après Noël

© Beatrice ALEMAGNA/ Autrement jeunesse

"Après Noël" de Beatrice ALEMAGNA est arrivé après les fêtes de fin d'année. Sa grande valeur est de mettre en avant et en images un certain malaise: les sapins de Noël jetés sur les trottoirs après leur office, même dès le 26 décembre.

© Beatrice ALEMAGNA/ Autrement jeunesse

Nous ne retrouvons pas d'histoire en tant que tel mais juste des impressions, des petits détails humains d'après fêtes dans des illustrations très urbaines. Ce sont des gestes, des sorties, des activités qui peuvent être anodins mais qui laissent dans la voix de la narratrice une tension.
L'humeur n'est plus aux festivités mais au quotidien qui poursuit son cours. Une suite de jours où la vie reprend, où les hommes et femmes partagent, s'offrent, accueillent... mais rien de cet enthousiasme électrique de la fin d'année festive.

© Beatrice ALEMAGNA/ Autrement jeunesse

Il y a une nostalgie, une perte de magie aussi dans ces collages d'immeubles, peu servis en nature, quartier proche, connu, mais sans émerveillement malgré les nouveautés. Le déroulement des jours est nostalgique... même les cadeaux de Noël ne permettent pas autant de joie, seul le rêve à travers les livres semble une perspective... dont un autre livre de l'artiste "Le secret d'Ugolin".

Encore un album sur la faille, comme toutes ses proposition
.

samedi 19 février 2011

Le oui de Paul Ricoeur

© Olivier ABEL et Eunhwa LEE/ Les petits Platons

"Le oui de Paul Ricoeur" d'Olivier ABEL illustré par Eunhwa LEE est une autre superbe proposition de cette maison d'édition "Les petits Platons" dont je vous parlais là.
J'ai pris beaucoup de temps avant d'en parler, négligeant mes engagements, parce que ce livre recèle bien plus que l'histoire de ce philosophe contemporain. Les réflexions me sont chères. Je ne voulais pas amoindrir son impact par un billet sans saveur. Mais il faut bien que j'en parle et je décide, à regret, le faire en espérant offrir à ce livre un second billet.

Paul RICOEUR, à la fin de sa vie, reçoit la visite d'une chouette et reprend en dialogue avec elle la trame de ses réflexions philosophiques. L'homme a vécu une vie riche et dramatique où se sont côtoyés la mort, la barbarie humaine et la richesse des partages, le bonheur des amitiés.
La chouette, matérialisation de ses objets de décoration nichés dans son intérieur mais aussi symbole de la sagesse, partant en retrait, offre ainsi la possibilité d'un échange entre cette vie ancrée et dure et les réflexions optimistes sur la vie humaine en général.
Les livres, en tant qu'écrits anciens ou témoignages d'une vie, preuves d'une existence, ont eu une valeur profonde pour l'homme. Il s'en entoure, se délecte de ces paroles écrites, les retranscrit, les traduit. Paul RICOEUR s'échine à proposer des nuances, à expliciter les discours pour améliorer la compréhension, délier les partages, anéantir dans l'œuf les futurs massacres historiques.
C'est aussi une philosophie de vie, une manière d'être au monde, de se construire, de se reconnaitre. "La question n'est pas d'accepter de mourir, mais d'accepter d'être né: se dire oui à soi-même." Cette présentation en fait un philosophe presque intimiste, pour plus de compréhension de l'homme, au plus près de notre volonté, de nos refus, de nos engagements et de notre existence dans un monde avec ou sans dieu.
Paul RICOEUR apparait humble, s'abreuvant des autres, des livres, cherchant des ponts entre chaque réflexion, chaque position.

Le texte d'Olivier ABEL est explicite, complet, clair. Il reprend des termes de philosophie mais aussi les inscrits dans une réflexion accessible. Les illustrations de Eunhwa LEE offrent une métaphore d'un voyage la nuit, un vol entre le passé et le présent, les hommes et leurs écrits. C'est doux et entrainant.

Ce livre mérite de nombreuses lectures. Il s'agit d'une proposition pour les (pré-)adolecents mais les adultes se pencheront avec délice dans ce texte, y reviendront pour repartir aussitôt chercher dans leurs bibliothèques d'autres livres.

© Olivier ABEL et Eunhwa LEE/ Les petits Platons

Une très belle présentation ici, en attendant que je revienne sur ce livre.

jeudi 17 février 2011

Devine, qui a retrouvé Teddy, une promenade invisible

© Gerda MULLER/ Lutin poche

"Devine, qui a retrouvé Teddy" de Gerda MULLER est une proposition sacrément intéressante pour les plus jeunes. A l'aide d'indices et de modifications d'une page à l'autre, le lecteur/visionneur, imagine l'histoire.
Les traces de pas sont colorés comme les chaussures, les empreintes des animaux se mêlent aussi et donne une histoire simple que l'on peut compléter avec les solutions proposées au début et à la fin de l'ouvrage. Selon l'enquêteur en herbe et son imagination l'histoire devient plus étoffée.

© Gerda MULLER/ Lutin poche

J'aime beaucoup aussi ce petit album pour ces vues de la nature, d'une promenade en forêt. De Gerda MULLER j'ai connu bien-sûr ses propositions Père castor mais il est vrai que ceux achetés par après, pour le lutin, reprennent cette nature à découvrir.

Nous avons "Mon arbre" dont je vous parlerais plus tard, décrivant les saisons, la faune et la flore en symbiose avec un chêne et les activités humaines de la forêt autour de lui. Il nous faudra aussi "Devine qui fait quoi" reprenant le même procédé que "Devine qui a retrouvé Teddy" sur des indices et des empreintes et "Où vont-ils quand il pleut" reprenant la météo et les aléas de la vie de la faune d'à côté...

Le voyage de Kaouto le petit renne

© Jan-Magnus BRUHEIM et Reidar Johan BERLE/ Circonflexe

"Le voyage de Kaouto le petit renne" de Jan-Magnus BRUHEIM et illustré par Reidar Johan BERLE est un road movies en Norvège.

Cet album est un peu dur à appréhender pour le jeune lectorat: nous suivons ce renne, Kaouto, éloigné de ses amis, les enfants du peuple nomade Sami (ou Samisk), Matti et Aino. Il a été vendu dans le sud de la Norvège, à Skjak, et va décidé de rentrer chez lui. Son périple sera long et ardu, il rencontrera la faune scandinave et ses habitants : des rennes sauvages, des écureuils, des élans, des cerfs et des gloutons. Les hommes travaillent, entre élevage de rennes, chasse, abattage des arbres, pêche.

© Jan-Magnus BRUHEIM et Reidar Johan BERLE/ Circonflexe

Ce livre ne se lit pas forcément comme une histoire du soir mais comme un documentaire sur la Finnmark au temps de l'élevage des rennes. En suivant ce renne, nous découvrons un mode de vie proche de cette nature magnifiée. De la glace, des étendues, les aurores boréales, des forêts, des montagnes. En cela, ce livre offre une très belle proposition, une transmission aussi d'un autre temps, même là-bas. Il m'a rappelé une superbe lecture que j'avais faite adolescente "Le rapt" de Roger FRISON-ROCHE. Et je pense qu'il peut être relié à un autre livre, "Aslak le petit lapon" de Dominique DARBOIS.

© Jan-Magnus BRUHEIM et Reidar Johan BERLE/ Circonflexe

Les illustrations de Reidar Johan BERLE sont magnifiques. Elles reprennent en une gamme de couleurs froides les nuances de la neige et de ce ciel blanc : nuance de gris, nuance de bleus, noir et blanc, bleu de canard, noir et les couleurs du costume local.
Les dessins stylisés offrent un apport au texte, proposant une autre vision de la nature et une stylisation très scandinave des éléments naturels, les troncs, la mer, la montagne par exemple.

© Jan-Magnus BRUHEIM et Reidar Johan BERLE/ Circonflexe

Rajout du 16/04/12: j'avais écrit que ce livre était déjà sorti avec un autre titre où le prénom du renne n'était pas l'original : "Le voyage d'Erwin le petit renne". Il n'en ai rien, Erwin était le prénom de travail et celui d'origine a été gardé. Merci Aude PASQUIER pour ces précisions.
Aude PASQUIER est la traductrice de ce texte. Et c'est vrai que jusqu'à présent je n'indiquais pas cette information: l'auteur, l'illustrateur, et je m'arrêtais là. C'est une erreur, le travail fourni par les traducteurs est conséquent et c'est grâce à eux que de magnifiques textes (jeunesses entre autres) arrivent jusqu'à nous.

Et personnellement, j'ai beaucoup d'affection pour ce livre car un husky est venu remplir nos vies 12 ans et elle, Freya, revenait dans les bagages de ma mère de cette partie du globe, la Laponie, et qu'un costume lapon, sami, samisk, a toujours été à la maison...

dimanche 13 février 2011

Le Prix Landerneau 2011 a été décerné


Cette année encore, j'ai eu le privilège d'être contactée pour la remise du Prix Landerneau. Il s'agit d'un petit prix littéraire qui monte: les espaces culturels LECLERC en sont à leur 4ième édition et c'est vrai que, chaque année, les découvertes en romans français de la saison sont intéressantes.
D'un autre côté, le fait qu'il s'agisse du travail de sélection de libraires/lecteurs apporte une panoplie de lectures belle, très sensible et argumentée. L'objectif du prix est de mettre en avant des auteurs encore peu connus et de leur offrir une visibilité autre que saisonnière. Les sujets sont aussi très ancrés, actualité ou faille de l'humanité.
Grâce à ce prix j'ai eu le plaisir de découvrir des auteurs que je souhaite suivre: Jérôme FERRARI (et dire que je n'ai pas encore parlé de lui!) et Tatiana ARFEL (même si je n'ai pas l'humeur pour lire son 2nd livre sur la violence de l'entreprise), entre autres.

Cette année les sélectionnés étaient nombreux:
"La blessure la vraie" de François BEGAUDEAU
"Une lointaine Arcadie" de Jean-Marie CHERVRIER dont je parle là
"Samba pour la France" de Delphine COULIN
"Tu verras" de Nicolas FARGUES dont je parle ici
"Les hommes sirènes" de Fabienne JUHEL dont je parle là
"Un homme ébranlé" de Pascale KRAMER
"L'homme de Lyon" de François-Guillaume LORRAIN
"Une langue venue d'ailleurs" de Akira MIZUBAYASHI dont je parle bientôt
"Les champs de Paris" de Yann SUTY
"Corps mêlés" de Marvin VICTOR
"Le Barbaresque" de Olivier WEBER


Le jury, composé de libraires des établissements E.LECLERC, de Monsieur Michel-Edouard LECLERC et présidé par le médecin romancier, Jean-Christophe RUFIN, a choisi "Samba pour la France" de Delphine COULIN. "Le jury a été particulièrement séduit par la double dimension, à la fois littéraire et humaine de ce roman." En effet, le livre est engagé. J'aime cette prise de position très conforme à la vocation du président. Et comme chaque année, le lauréat est un livre que je n'ai pas encore lu.
De mon côté, j'ai eu d'autres coups de cœur : FARGUES en premier, CHEVRIER... puis JUHEL et MIZUBAYASHI. Quatre livres qui m'ont beaucoup interpellée et j'aime cela.
Et quel plaisir de pouvoir parler de cette pertinence de l'éducation avec Mr FARGUES, conversation trop courte malgré la grande disponibilité de cet auteur. Merci encore.

La remise du prix s'est faite à la Maison de l'Amérique latine, toujours aussi belles pièces et bon buffet. Malheureusement le changement de saison de la sélection ne nous a pas permis d'aller dehors. Et il manque encore, à mon goût, les livres. Aucune page écrite, aucun livre ouvert, aucune possibilité de partager un extrait même si quelques auteurs s'étaient déplacés.

samedi 5 février 2011

Les hommes sirènes


"Les hommes sirènes" de Fabienne JUHEL nous emmène dans la férocité des contes et des ogres réels.
L'homme a une quarantaine d'années, une femme, un fils mais aussi un goût de sang dans la bouche et un caillot près du cœur. Poète fourbu de comptines et perdu dans son monde, se mettant au chômage, se bousculant pour être en marge toujours, il prendra le prétexte d'une mention sur une palissade publique pour tout quitter. Il part voir la mer, cette immensité qu'il a côtoyée enfant sans jamais la regarder, toujours image ou paysage derrière un couple, ses parents adoptifs : Eve et Eli ECKERT.

C'est vrai qu'il faut avoir envie, qu'il faut s'efforcer de commencer ce roman. Le style n'est pas si simple avec cet individu, le héros, à la troisième personne mais toujours appelé "l'homme". Mais ce même style offre de la poésie, de la noirceur, de la vigueur, de l'ardeur, des "tripes" à chaque page. Alors à la troisième page, on entre dans ces courts chapitres. Mais surtout, la lecture ne laisse pas indemne, il faut vouloir s'embourber, sentir venir la sueur sur la nuque. Non pas de peur mais de cette abomination des cauchemars. L'homme, au fil des pages, retrouve une identité: civile, Antoine (ou Abhra de son vrai nom indien); historique, enfant adopté par un couple survivant des camps de concentration; mais aussi une enfance, une trame éducative qui en a fait un homme barbare et humain.

Le lecteur entre images après images dans l'enfance. Un petit indien acheté à son père mais surtout élevé avec des valeurs suintantes de "monstruosités". La survivance aux camps de concentration laisse là une marque indélébile, une envie de maîtrise, de contrôle mais aussi de transmission de la souffrance. L'enfant revit dans les histoires inventées, dans les confidences réelles et dans l'apologie de "méchants" de contes pour enfant toute la douleur que les hommes peuvent infliger aux autres. Aucune image ne lui est épargnée, elle est même mise en avant, théâtralisée pour donner encore plus de résultat. L'homme est alors un amas de chairs, d'os, de points d'impact, de lignes de souffrance. La vie n'est possible que dans cette culpabilité à être une chair pourrie, morte sans l'être, sans envie, sans joie, sans amour.

Et puis il y a cet homme, l'adulte devenu. L'adulte qui n'a plus peur des contes pour faire peur, mais à quel point? Il reprend de la vie, de la liberté, en jouant aux jeux d'enfant, en suivant un parcours de hasard, d'impressions. Il revient sur cette transmission de la torture. Cette souffrance si importante qu'elle ne peut finir que mal.

Mais que dire encore de cette éducation! Elle est scotchante, ahurissante. L'enfant est un jouet d'adulte, soumis à une manipulation, un façonnage. Et les livres ont leur place. Une place de choix, même. L'adulte n'est pas devenu poète pour rien. Les histoires sont choisies pour être représentatives de la noirceur humaine, pour appeler le cri, les gémissement,s l'abandon.
Encore heureux que d'autres adultes, représentants d'une certaine humanité, se retrouvent sur son passage: une cuisinière, un sorcier mais aussi une vieille dame, en fin de parcours, au métier si salvateur. Le livre est cela: du chaos, du vide, l'adulte va apprendre à ne plus être un déchet... à se libérer d'une forme d'humanité pour en trouver d'autres, belles, douces, passionnelles, spontanées et amoureuses.
Le livre est à relire, parce que sous ses images peut-être fictives, ses cauchemars de loups, de meurtriers du règne animal, de bourreau des plus fragiles (chaperon-rouge mais aussi enfant, ou dans sa forme domestiqué pour, l'homme démuni) il y a un espoir, un loup multiple. Et puis il y a la mer, l'océan, ce liquide engluant où l'on peut se perdre, revenir, où l'on peut mourir mais aussi se laver, être ingurgité et recraché avec le bois flotté, être un "homme sirène" prêt pour la Rédemption, la sienne, celle d'une famille, celle d'une douleur humaine.

Un très bel avis, très pertinent et argumenté ici, un autre .
Ce livre est sélectionné pour le prix Landerneau 2011. Merci à Faits&Gestes.
Je n'avais pas réussi à entamer profondément son autre livre "A l'angle du renard", sélectionné pour le prix Landerneau 2009. Ce livre me donne envie d'y revenir.

mardi 1 février 2011

Humanimal, notre zoo intérieur

Je n'ai pas encore dit tout le bien que je pensais de la collection "Dame nature" des éditions Gulfstream. Il s'agit de documentaires pour enfants alliant le scientifique à l'humour. Le parti-pris est vraiment d'harponner les enfants avec des caractéristiques bien rigolotes: de la faune ou flore d'un certain milieu, qui pète, pue, pique, crache, pince, pisse, perce et colle. Chaque chapitre offre des focus détaillés. A chaque double page un nouveau cas, une description scientifique avec son dessin réaliste et pour aller plus loin des anecdotes sur le pourquoi du comment et un petit lot de blagues. La composition est elle-aussi très bien: aérée, précise, offrant des ombres chinoises, quelques classifications et aussi un part de réel et une part de fiction.
Les livres sont autant des documentaires à ouvrir pour s'instruire que des pages à lire comme lectures du soir. L'appel des illustrations humoristiques permettant de tout à fait s'arrêter en cours de lecture.

© Jean-Baptiste de PANAFIEU, Benoît PERROUD et Lucie RIOLAND

"Humanimal, notre zoo intérieur" de Jean-Baptiste de PANAFIEU, illustré par Benoît PERROUD et Lucie RIOLAND est le second de la collection à arriver chez nous.
Le corps humain est décomposé en éléments et comparé à celui de ses cousins, les autres animaux. Les membres, la tête, la peau, l'intérieur du corps, les comportements, la séduction... les poux.

© Jean-Baptiste de PANAFIEU, Benoît PERROUD et Lucie RIOLAND

Ici la première page présente l'humain et un animal, à la page suivante nous avons l'origine de cette particularité chez tous les animaux et leur évolution. Puis un "saviez-vous" plus anecdotique ou humoristique.

© Jean-Baptiste de PANAFIEU, Benoît PERROUD et Lucie RIOLAND

Le fait de prendre un détail et de le mettre en apposition à son équivalent (ou son absence) permet de vraiment le regarder. Les différences sont flagrantes, les dessins les mettent en avant. Le sujet est sérieux et le texte comporte un vocabulaire précis et même scientifique. Les mots plus compliqués sont colorés et peuvent vraiment amené à une réelle instruction. Mais ce serait limiter la portée des livres de cette collection.
Oui les informations sont exactes et nombreuses mais l'approche est vraiment très amusante, appropriable par des petits et des pré-adolescents. Les textes et illustrations offrent aussi de multiples autres références (un Cyrano face à un nasique, singe au nez proéminent, King Kong ou Robert de Niro dans une de ses répliques cultes) mais aussi des situations loufoques ou des jeux d'enfants pour présenter autrement le propos. C'est en riant que les enfants retiendront une ou deux choses.

L'association des dessins très réalistes, précis et texturés, de Lucie RIOLAND et de ceux plus stylisés et humoristiques de Benoît PERROUD permettent aussi cette double lecture. Une lecture rapide, d'une jeune enfant qui sera peut-être plus intéressé par les blagues, et une lecture plus poussée avec des détails plus importants.
Le constat est clair: ce livre est instructif, fabuleux de détails, de couleurs, d'indices et aussi de belles approches de la différence humaine : anomalie du nombre de doigts, queue persistante etc...

© Jean-Baptiste de PANAFIEU, Benoît PERROUD et Lucie RIOLAND

J'avais parlé il y a longtemps de « Les plantes qui puent, qui pètent, qui piquent » de Lionel HIGNARD, Alain PONTOPPIDAN et illustré par Yann LE BRISH... , depuis il est arrivé chez nous et j'en parle un chouïa là mais je n'ai pas encore parlé de cet autre livre qui a fait notre bonheur pendant nos séjour au bord de mer, "Les Bêtes qui crachent, qui collent, qui croquent à la mer" de Jean-Baptiste de PANAFIEU, illustré par Amandine LABARRE, Benoît PERROUD et Lucie RIOLAND.
Mais n'hésitez pas à tenter cette aventure faunesque et floresque! Vous ne regarderez plus le vivant de la même manière!