lundi 26 juin 2017

Hôtel Receptor


Igor se prépare à retrouver des amis pour le week-end dans leur maison de campagne. Il prend le train et les indications de son hôtesse sont claires: ne pas prendre le premier mais le second train. Sous pression ou lassitude, Igor se trompe et découvre qu'il ne peut pas s'arrêter à son arrêt. Le contrôleur lui indique la marche à suivre: dormir dans un compartiment couchette et repartir avec lui quand ce même train ferait marche arrière. Et puis ne pas s'effrayer de la cohue et de la brutalité des voyageurs qui montent et vont se déverser à l'arrêt de l'Hôtel Receptor.
Mais rien ne marche comme prévu. Le contrôleur n'est plus, le train ne part plus, destination final ce fameux hôtel.

Avec les premières pages, le lecteur comprend que les règles ne sont pas les mêmes, que le héros se retrouve dans un espace régi pour lui seul. L'hôtel est la destination rêvée de nombreuses personnes. Les réservations se font des années auparavant, les clients viennent avec toute leur famille... et ne repartent pas. Aucun transport n'est prévu pour lier ce lieu à la ville la plus proche, si éloignée.
Mais Igor n'est pas attendu, n'est sur aucune liste. Il faut faire quelque chose: l'hôtesse d'accueil le fait passer pour un membre du personnel. Très peu de personne seront au courant, les services travaillent en complète autonomie. Mais Igor lui ne veut qu'un entretien avec le directeur, parti. Pour où, personne ne sait, pour longtemps, personne ne sait non plus.
Alors Igor commence à travailler dans un service, plus l'autre. Mais tout est loufoque. Il faut retrouver les pêcheurs qui n'ont pas ramener la livraison de poissons. Sont-ils morts? Ont-ils rencontrer le monstre? Et cet homme qui l'accompagne aux pouvoirs étranges. Ou vigile au théâtre mais comme un spectateur de choix. Ou accompagnateur de sortie pour enfants. Il faudrait les perdre.
Ce lieu est mystérieux, connu, sujet de reportage mais il est comme un espace de vie à part. Des services exceptionnels, des transports individuels ou en commun internes, des écoles.
Une magie oppressante opère. Le lieu, face client ou pile personnel, est tentateur. Les personnages aussi.

De l'envie, du mécontentement, des vocations latentes, une précipitation des employés et pourtant un temps lent et volontairement assoupi ou mis à profit pour ce qui pourrait compter: l'art, la création en devenir (la Résidence des livres accueillent les livres en cours de création, rendus autonomes ou destinés à être conservés à la postérité. "Ici, les oeuvres prennent forme, se déploient et s'épanouissent, chacune à sa manière, dans des conditions optimales. Elles respirent l'air de Receptor."
Le roman de Raia Del VECCHIO est un peu bancal mais les touches de folie restent en tête, par exemple cette autruche. Le règlement officiel et officieux de l'Hôtel Recpetor me manque pour découvrir encore plus les zones sombres.

Merci à l'opération Masse critique de Babelio et aux éditions Phébus.

mercredi 21 juin 2017

" - Les messagers de Wolf sauront où et comment vous trouver. Ils viendront vers vous. Si vous êtes vigilant, vous ne pourrez pas les rater." - Hôtel Receptor


"Mais lorsque Igor entra dans sa chambre, une grosse tache noire obstruait la fenêtre. [...] à y regarder de plus près, Igor distingua des touffes de plumes écrasées contre la vitre. Lorsqu'il effleura le carreau, la masse noire se mit à remuer et une tête d'autruche apparut, tordant son long cou derrière son dos. L'oiseau essayait de pousser la fenêtre de son front, et comme la vitre lui résistait, l'animal s'irrita et se mit à frapper avec son bec. Igor ouvrit. Il mit du temps à saisir ce que l'oiseau lui voulait: Igor devait monter sur son dos. Déjà l'autruche montrait des signes d'impatience, elle étirait ses longues pattes l'une après l'autre pour montrer à quel point cette position assise lui était inconfortable. Igor revêtit son manteau, grimpa sur le rebord de la fenêtre et s’agrippa à l'oiseau. Sans attendre, l'autruche se dressa sur ses pattes et s'élança du toit. Elle se laissa tomber à pic. Les étages de Receptor défilèrent à toute vitesse. Igor et l'oiseau aux membres mal dégrossis allaient s'écraser sur le tapis en caoutchouc devant l'entrée quand, soudain, à l'approche du cinquième étage, l'autruche se mit à battre des ailes de toutes ses forces. Elle se maintint à une altitude égale. Puis elle se mit à voler à grands battements d'ailes.
[....]
Dans ses efforts, l'autruche soufflait fort. Elle émettait de petits sons, comme un murmure. Depuis le début du voyage, elle semblait répéter une même formule mal articulée, à peine audible. L'oiseau atterrit de l'autre côté du canyon. Emporté par son élan, il courut à toute vitesse sur le sol rocailleux, ralentit, freina, et s'effondra d'un seul coup. Igor se releva. L'autruche ne remuait plus. Il secoua l'oiseau, en vain. C'est alors que sa main rencontra une mince chaîne autour du cou de l'autruche, à laquelle un message était accroché. Igor s'en saisit:
"J'espère que vous avez passé un agréable voyage. Maintenant, à vous de poursuivre la route par vos propres moyens. [....] Ne vous occupez plus de moi, nous autres, autruches, devons récupérer plusieurs jours après un tel effort." "
(extrait de "Hôtel Receptor" de Raia DEL VECCHIO, Phébus; source photo)

samedi 10 juin 2017

"- Ah oui ? C'est quoi la vie? C'est où?" - Kinderzimmer

Je ne fais plus d'avis de lecture. Plus le temps. Non, c'est faux. Le temps je pourrais l'avoir, le prendre d'ailleurs et retrouver le plaisir de parler d'un livre opportun.
Je n'en ai plus le courage, cela reviendra ou pas.

Il y a tout de même des lectures que je ne peux pas taire, de celles qui vous chamboulent, qui seront bien dans une pile de livres à relire. "Kinderzimmer" de Valentine GOBY fait partie de ces livres, un coup de poing dans le plexus.
Une descente aux enfers, les camps de la mort pendant la seconde guerre mondiale, des moments de présent pur où la vie doit prendre le dessus. Une morsure d'un chien de SS évitée, et voilà l'espoir. Il est si ténu. Mila arrive au camp avec sa cousine et enceinte. Elle décrit ses corps décharnés, ce manque d'humanité, ces squelettes ambulants plus proches de la mort, de la pourriture, de la décomposition que d'un semblant de vie. Et il y a ce pincement au corps, ce ventre dur, ce foetus qui sera sa perte ou son bonheur. L'Allemagne ne peut pas perdre dans le camp, mais elle ne peut pas vraiment gagner, un concert d'ongles, des pianos offerts aux vents et à la pluie, des épingles coincées dans l'entre-jambe, des morceaux de savon... Il y a un scintillement d'humanité, là, juste là... dans un brossage de dents.


"- Tu ne brosses plus tes dents. Tu ne peignes plus tes cheveux avec tes doigts. Tu ne laves plus ton visage. Les coutures de ta robe grouillent de poux. Tu t'écorches. Tes vêtements sont tachés. Tu pues.
Assise sur la paillasse, Mila ne répond pas.
- Deux nuits que je dors avec toi. Je t'ai vue au début, quand tu es arrivée. Tes cheveux blonds et lourds et ta peau de lait. Tu avais la nuque droite. Regarde-toi.
Teresa passe la main sur les cheveux de Mila, mèches crépues en boules d'algues mortes [...]
- Tu ne te mouches plus qu'avec les manches de ta veste. Tes ongles sont dégoutants. Moi je suis ici depuis trois ans. Vois mes dents. Mes ongles. Mes cheveux. J'ai fait raser ma tête pour éviter les poux. [...]
Mila essaie de dégager sa tête, de décrocher la main de la Polonaise en soulevant ses doigts un à un mais la fille serre, enfonce les joues de Mila entre les mâchoires comme on force la gueule d'un chien. De la bouche de Mila ne sort plus qu'un borborygme.
- Je ne te lâche que si tu y vas, que si tu te jettes contre les barbelés.
[...]
- Non? Tu n'as pas envie? Je t'ai vue quand ton amie est morte, j'ai vu comme tu te palpais le corps, ça te soulageait que la mort l'ait prise, elle. Je t'ai vue lui enlever son sac et lui arracher ses chaussures, des chaussures meilleures que les tiennes, et tu as tout de suite mangé son pain. Tu voulais vivre. Tu n'iras pas te jeter contre les barbelés. Mourir maintenant ou plus tard ça ne t'est pas égal. Alors debout, va te laver les dents!"

(extrait "Kinderzimmer" de Valentine GOBY, Babel Actes sud; source photographie)

mardi 6 juin 2017

Kitty Crowther

... parce que je l'adore
... parce que je ne peux pas visionner son documentaire sur la télévision belge.
... parce que je viens de découvrir qu'un de mes professeurs éphémère de Mooc littérature jeunesse, Michel Defourny, parle d'un de ses livres, "Moi et rien".
... parce que... "L'enfant racine" ici.
....
... parce que j'aimerais parler de ses livres encore et encore