"Héphaïstos s'était surpassé, jamais on n'avait vu ouvrage plus finement sculpté. Son regard fut attiré d’abord par une scène cruelle: la Mort tirait un cadavre par les pieds. Juste à côté, plusieurs berges tombaient sous les coups d'ennemis. Une ville semblait en proie aux attaques d'une armée d'assaillants. Ulysse ne pouvait plus détacher ses yeux des scènes représentées sur le bouclier. A côté de cette ville en guerre, une cité en paix surgissait du bronze. Un splendide champ était en train d'être labouré, des moissonneurs au travail fauchaient les céréales avec habilité, dans le champ voisin un immense vignoble était chargé de lourdes grappes. Des jeunes gens emportaient le raisin dans de grands paniers d'osier. Et voilà un vallon où des troupeaux de moutons paissaient paisiblement. "C'est cela, murmura Ulysse, c'est bien cela le bonheur. La vie et la paix. Héphaïstos nous indique le chemin..." C'est alors que surgit une grande farandole. C'était une scène de noces! Les filles qui dansaient portaient des couronnes en or. Les garçons qui leur tenaient la taille avaient de beaux habits. Le travail du dieu forgeron était si fin qu'Ulysse eu l'impression de voir la danse villageoise s'animer!
"Tu aimes ce bouclier, valeureux Ulysse, n'est-ce pas?" Perdu dans sa contemplation, Ulysse n'avait pas vu Agamemnon arriver. "Par ton courage au combat, par la manière vaillante dont tu n'as pas laissé le corps d'Achille aux ennemis, tu as mérité que ce bouclier te revienne." Ulysse, ému, accepta en silence ce précieux héritage. "C'est un bouclier de paix, murmura-t-il. Les quatre saisons et le bonheur de vivre y sont gravés..."
(extrait du "Feuilleton d'Ulysse" de Murielle SZAC, Bayard jeunesse; source image)