dimanche 29 octobre 2017

L'hiver ensorcelé de Moomin

Oserais-je le dire? Oui, j'aime énormément Tove JANSSON, ses nouvelles, son univers et les bandes dessinées préparées avec son frère Lars. Et pourtant je n'ai pas été complètement sous le charme des deux livres jeunesse lus: "Moomin le troll, le chapeau du magicien" et "Les mémoires de Papa Moomin". Les récits étaient décousus, et pourtant, que d'extraits magnifiques.
Mais voilà le tome qu'il me fallait: "L'hiver ensorcelé de Moomin" (ou "Un hiver dans la vallée de Moumine" ancienne version aux éditions Fernand Nathan) est d'une beauté du début à la fin. Plus lisible, toujours aussi poétique mais aussi plus fluide.

© Tove JANSSON/ Le petit lézard

Moomin vit dans la vallée des Moomins avec sa famille, son père, sa mère, Mademoiselle Snorque. Et à chaque automne, ces trolls hippopotamesques ferment la maison, la calfeutrent et hibernent jusqu’au printemps en s'endormant dans leur lit.
Mais cette année Moomin se réveille en plein hiver. C'est une catastrophe, il fait froid, rien ne ressemble à sa vie normale, la vallée est méconnaissable. Il est seul, triste et ne souhaite qu'une chose, réveiller sa mère. Mais rien n'y fait.
Il rencontre Tou-ticki qui a pris ses quartiers dans le cabanon de bain de la famille Moomin. Elle parait sans gène, se servant des affaires des Moomins avec les musaraignes invisibles, ses amies. Et puis il y a cet écureuil un peu étourdi qui réveille la petite Mu, feu follet un peu égoïste. Et les autres qui ne trouvent pas de nourriture et ont appris que dans la vallée des Moomins il y avait une cave pleine de pots de confiture. Oui mais ce sont toutes les réserves de Maman Moomin. Peu à peu la vallée accueille tous les laissez pour compte.
"Que viennent les muets
seuls et timides
sauvages et tranquilles"
Et Moomin est désolé, nostalgique de son été, effrayé par cette population inconnue, respectueuse dans endormis mais pas forcément de leurs affaires. Ils sont nourris de soupes et de confitures. Et ne sont pas forcément aimables. Repartiront-ils au printemps? Et cet émule si peu agréable qui skie toute la journée?
Et que dira Maman Moomin de ces objets utilisés à d'autres fins et abimés, ou disparus, de cette vaisselle non faite, des pots de confiture vides, du banc du jardin parti pour un bucher de joie.

L'histoire nous entraine dans ces journées longues et noires. Très noires car durant quelques temps, des jours, des semaines, le soleil ne se lève pas. Nous découvrons la neige, les aurores boréales, la mer gelée, l'effrayante Dame de glace, la non moins mystérieuse Courabou. Tou-ticki est l'hôtesse de la saison, celle qui appelle les démunis, met en garde des dangers, accompagne Moomin. Son bonnet rouge marque la chaleur dans la saison, elle acclamera le printemps aussi, à sa manière. Avec elle, Moomin prend patience, de ce premier jour où le soleil reviendra, juste un peu. Elle est de celles que personne pense à remercier quand elle réchauffe les héros après leur aventure. Et puis il y a Maman Moumine, elle aussi réconfortante.
L'hiver est magnifié mais n'est pas doux: froid, luminosité, gel, manque de nourriture. L'auteure nous offre des sensations, des images, des bruits, de la festivité et de la musique. Les inconnus sont accueillis même incompris, les ancêtres ont leur place. Pendant un hiver la maison de Moomin a servi de décors à une autre vie qui ne semble pourtant pas parasitaire.

© Tove JANSSON/ Le petit lézard

Voilà la force de Tove JANSSON: laissez à ces lecteurs/héros le temps d'appréhender les choses, seuls tout en étant accompagnés, leur laissez la liberté, celle aussi de se tromper et de voir le beau derrière la gêne. Les bons sentiments sont là mais ils ne sont pas seuls.
Et puis tout est poésie: un cheval de neige, une pêche sur un rocher sous la glace.

© Tove JANSSON/ Le petit lézard

Tou-ticki et Mu, la sérénité et le grain de folie. Quoique: "Elle frottait les carreaux rouges et verts pour que la première mouche de l'été soit contente."


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