samedi 26 septembre 2009

Le musée du silence




« Le musée du silence » de Yoko OGAWA : Un jeune muséographe est embauché pour répertorier, classer et conserver des objets incongrus : objets du quotidien dérobés appartenant aux défunts du village. Nous entrons tout de suite dans une atmosphère pesante (froide ou étouffante) d’une société banale mais non sans secret. Des côtés pratiques liés à la réalisation d’un musée, nous passons par la vie saugrenue d’une société et l’enlisement dans un trafic pas très sain.

Ce roman pourrait être glauque mais la lecture est continue : comme le narrateur, nous recherchons quelque chose sans savoir de quoi il s’agit. Il est peut-être question de silence : un silence profond en soi quand tout autour est bruyant « Les prédicateurs sont à la recherche du silence, pas de l’interdiction de parole. Le silence doit exister en nous, pas autour. ». Une certaine recherche de plénitude, une reconnaissance de ce pourquoi nous sommes ici. Il n’y a pas de noms prononcés, juste des fonctions (la jeune fille, la vieille dame, le jardinier, la femme de ménage, le prédicateur…la ville… la place).
L’idée de transmission aussi m’a beaucoup touchée. Une transmission matérielle, émotionnelle, mais pas celle que nous croyons. L’objet destiné au Musée du silence n’est pas légué par la famille…il est « arraché » au défunt, comme si la seule mémoire possible d’autrui est ce que nous lui subtilisons et non ce que l’autre veut bien nous transmettre. L’objet est symbolique mais pas dans la représentation que nous nous faisons de son propriétaire mais dans celle qui perdure au-delà de la mort.

*oeuvre photographique de Dave Mc Kean
« En dehors du hall d’entrée, je voudrais détruire cette remise au bout de l’aile à l’est pour en faire un espace de repos avec un sofa. Cela donnera une couleur à la visite et permettra de se reposer de la « fatigue du musée ».
- Parce qu’on se fatigue en venant au musée ? Ce n’est pourtant pas un travail pénible.
Elle balançait ses jambes qui n’arrivaient pas jusqu’au sol.
- Oui, c’est vrai, la distance à parcourir n’exige pas une grosse dépense d’énergie. Mais un musée est source de tension nerveuse spécifique. Parce que c’est la confrontation, dans le calme, des objets exposés et des visiteurs. A plus forte raison si ces objets sont hérités des défunts. »


Une bonne résolution me reste après la lecture : ne m’occuper dans ma vie que de ce que j’ai acquis par moi-même. L’héritage, c’est peut-être cela, laisser aux autres le soin de conserver leurs passés et futurs fantasmés et ne partager que notre présent commun.

Pour avoir une idée de cette auteure, n’hésitez pas à lire l’avis sur un autre de ses livres de Katell ici et le très complet billet pour ceux qui voudraient se lancer à corps perdu dans son œuvre.

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