vendredi 28 juin 2013

C'est ta vie, l'encyclopédie qui parle d'amitié, d'amour et de sexe aux enfants

Je cherchais depuis quelques temps déjà un documentaire sur la vie, l'amour et la sexualité, adapté aux enfants. Je ne trouvais jamais mon bonheur, le propos était, pour moi, évasif, trop prude, "bien pensant". J'ai porté mon dévolu sur une proposition des éditions Oskar. Le contenu est un peu plus "franc du collier" mais que cela ne vous arrête pas!

© Thierry LENAIN et Benoit MOREL/ Oskar

"C'est ta vie, l'encyclopédie qui parle d'amitié, d'amour et de sexe aux enfants" de Thierry LENAIN et illustré par Benoit MOREL est un documentaire qui ne se limite pas à expliquer ce qu'est l'amour, la sexualité et la naissance. Enfin si mais avec tout ce qu'il y a autour. Je n'avais d'ailleurs aucun doute: pour avoir suivi les propositions de Thierry LENAIN dans la collection "Trimestre", je pensais bien trouver là des nuances, de la réflexion et du fond.

Le livre est répartit en plusieurs chapitres.
Les liens parlent du lien social, des relations entre les gens, de la simple politesse à la relation de cœur. Puis l'auteur distingue l'amitié et l'amour, cette apposition ou fusion des cœurs, et présente l’hétérosexualité et l’homosexualité. L'amour est alors le début d'un lien plus fort, une envie de profiter l'un de l'autre, de vivre ensemble (ou non), de partager tous les loisirs (ou non) et d'être parent (ou non).
Les contacts définissent le niveau de promiscuité des corps, de la bousculade au toucher réel, du geste de politesse, de consolation ou du manque de gestes (même si les sentiments sont présents). Puis les câlins sont définis dans leur rapport d'affection et distingués des câlins sexuels.
Les interdits reprennent les lois contre la pédophilie, l'inceste mais aussi le respect des enfants, le consentement mutuel (entre adultes) et les relations sexuelles des adultes dans l'intimité et cachées aux enfants. Une très belle explication est offerte aussi sur les dérives de l'internet, sur cette accessibilité exacerbée des intimités: pas de porte fermée, pas de disposition difficile d'accès... la sexualité est placardée et le contrôle parental installé pas pour surveiller l'enfant mais le protéger.
Le corps est un chapitre plus conventionnel, biologique, quoique. La puberté est expliquée, l'anatomie montrée mais il est aussi question de masturbation, comme prise de conscience de soi mais aussi premier plaisir non-coupable (si seul avec son intimité).
Le bébé est la reproduction sexuelle humaine expliquée mais aussi tous les aléas de la vie, l'impossibilité d'en avoir, les solutions, la volonté de ne pas être parent. Et bien-sur cela finit par la naissance.
Un épilogue suit avec des questions réponses assez enfantines mais justement décomplexantes.

© Thierry LENAIN et Benoit MOREL/ Oskar

Le propos est presque politique: extrêmement tolérant (et c'est parfaitement ma priorité) sur le métissage, l'homosexualité, l'avortement, la fécondation in vitro et l'adoption mais aussi sur une certaine froideur des sentiments (une émotion retranscrite différemment) ou une frivolité apparente. Attention cependant il n'est pas ici question du débat politisé du moment: mariage pour tous ou de procréation médicalement assistée pour les homosexuels.
Tout est dit avec finesse et beaucoup de respect. Thierry LENAIN se positionne toujours sur le droit de chacun à être ce qu'il est, dans les limites de la loi et du respect des enfants.
Au fil des pages, l'auteur propose aussi des numéros de téléphones pour ne pas laisser l'enfant lecteur dans une situation difficile.

© Thierry LENAIN et Benoit MOREL/ Oskar

Les illustrations de Benoit MOREL sont, ici, assez déconcertantes. Elles ont pourtant la qualité de mettre derrière le propos un peu de couleurs et de ne pas aseptiser les informations. Un schéma internes des organes génitaux mais aussi une manière sexuée de se regarder l'intimité sont présents. Quelque part dérangeant et pourtant, mais oui bien-sûr, une part importante de la connaissance de soi.
L'imbrication des corps, lui, est juste évoquée mais pour le reste, Benoit MOREL montre la différence dans les relations, dans les gestes. Beau dialogue entre le texte et les dessins!

Maintenant reste à savoir à quel jeune lectorat il est destiné. Bah, je ne sais pas. En tous cas bien avant que la reproduction humaine soit au programme scolaire. Bah, dès que l'enfant se pose des questions et sait lire seul certains chapitres!

Et l'avis de Gaëlle très pertinent ici, présentant aussi ce parti-pris réel des auteurs de proposer une autre vision de la sexualité, la présentation presse.

Fables, Esope

J'aime l'idée de proposer aussi à mon lutin des classiques. Dans cette optique culturelle, les fables d’Ésope étaient les bienvenues et c'est vrai que cet album propose un beau compromis entre l’illustration et le texte.

© Ésope, Jean-François MARTIN et Jean-Philippe MOGENET/ Milan jeunesse

"Fables, Ésope" illustré par Jean-François MARTIN, adapté par Jean-Philippe MOGENET nous présente ainsi une vingtaine des "premières" fables de l'histoire, celles du philosophe grec ÉSOPE, pour certaines reprises et complétées par Jean DE LA FONTAINE. Bien qu'elles aient survécu par oralité, cette adaptation offre une belle mise en scène du propos humoristique.

Nous découvrons ainsi les premiers duels animaliers: le lièvre et la tortue, le renard et le corbeau, le loup et l'agneau, la cigale et la(les) fourmi(s)...
Sous couvert d'anthropomorphisme animale, il est bien-sûr question des travers humains et d'une critique de la société. La vanité de rats chapeautés, la sottise d'un corbeau tenant dans son bec un morceau de viande, d'un renard goinfre ou d'une tortue inconsciente, l'humilité d'un rat des champs, d'un rat reconnaissant, la méchanceté de certains loups.
Les relations humaines sont ici décrites dans leur rapport de pouvoir, dans une forme de fatalité et de prise de conscience.

© Ésope, Jean-François MARTIN et Jean-Philippe MOGENET/ Milan jeunesse

Le lexique est parfois complexe et l'apport de la morale demande souvent un temps de partage parent-enfant mais (ou bien, ainsi) cet album est à recommander. Ces fables sont effectivement très appréciables pour une lecture enfantine : le texte est court et ne nous emmène pas dans un vieux français et des tournures de phrase complexes comme les offre Jean DE LA FONTAINE. Elles proposent aussi par l'exemple ces morales qui donnent à réfléchir.

© Ésope, Jean-François MARTIN et Jean-Philippe MOGENET/ Milan jeunesse

Le travail de Jean-François MARTIN est très graphique, il offre à ces fables une modernité et une théâtralisation. Et que dire de ses pages, elles sont magnifiques de textures, d'ombres et de couleurs, bonifiées même par le papier gaufré.

Merci à Lily et aux éditions Milan jeunesse.

jeudi 27 juin 2013

L'Univers ce que l'on ne sait pas encore...

Décidément Le Pommier donne de très belles pommes! En effet, j'aime énormément cette maison d’édition qui a pris le pari d'offrir à nos enfants des documentaires scientifiques précieux. Je vous avais parlé de la collection "Les Mini-pommes" en ne vous citant que "Au cœur des émotions" (et pourtant j'en ai une petite collection) qui permet au travers d'une histoire de comprendre un fait scientifique, j'y reviendrais rapidement. Je vous avais présenté aussi le versant éducateur ou parent, collection "Education", qui propose des livres mettant en avant une science et des astuces pour la faire appréhender différemment, et là encore je ne vous ai présenté que "L'enfant et le temps" (et pourtant j'en ai bien d'autres).
Aujourd'hui je vous présente une autre collection, fabuleuse à de nombreux points de vue, "Sur les épaules des savants".

© Anna ALTER, Hubert REEVES et Églantine CEULEMANS/ Le Pommier

"L’Univers ce que l'on ne sait pas encore" d'Anna ALTER avec Hubert REEVES et illustré par Églantine CEULEMANS est le premier de cette collection.
L'Univers est ici présenté comme étant tout ce qui nous entoure, du plus petit dans la terre, comme du plus grand dans le ciel, de tout ce qu'est matière (voire même un peu plus). Bien-sûr avec les apports de l'astrophysicien les chapitres présentent des questions d'astronomie plus particulièrement.
Oui, nous aurons la formation de notre Galaxie, du Système solaire et de ses planètes dont la Terre. Mais cet album illustré n'est pas un documentaire comme les autres. Un parti-pris est bien présent, de comparer la Terre et Vénus par exemple mais aussi les enseignements sont autant de réponses que de questions. Les enfants sont directement interpellés pour continuer à répondre, pour suivre une voie scientifique dans leur vie active. L'Univers et tout ce que nous ne savons pas, mais aussi la présence de la matière, la "bougeotte" des galaxies, la naissance des étoiles et la vie sont alors abordés avec beaucoup de détails.

© Anna ALTER, Hubert REEVES et Églantine CEULEMANS/ Le Pommier

Les chapitres commencent avec comme un poème en rimes, chaque ligne est en suite explicitée et prend alors un lexique aussi bien scientifique qu'animé. Beaucoup d'éléments langagiers donnent à croire que la mémoire des plus jeunes sera attisée, c'est simple, complet et ludique!
"Une étoile est née, coiffée d'un immense disque sombre:
Cette étoile, c'est notre Soleil. Dès que son cœur est devenu brûlant, il a commencé à briller. Les poussières tournaient autour de lui comme des mouches. Elles formaient autour de sa taille un énorme nuage sombre..."
Chaque chapitre finit par un aparté d'Hubert REEVES. Il n'y a pas à dire, si le lecteur a une curiosité, il sera harponné avec en plus de nombreuses voies pour continuer à être observateur, participant et peut-être futur scientifique. Destiné aux enfants de 7 à 11 ans.

Et bien-sûr j'ai déjà acquis le second volet sur le vivant... à suivre!

dimanche 23 juin 2013

Jeu

L'été est là...


"Jeu

Au bout de la plage,
des hommes âgés
sont penchés
sur des boules argentées.
Grand-père a gagné le point.
Il fait des gestes en l'air.
Il y a des éclats de voix,
du soleil
et de la lenteur.
De la lenteur?
Non.
Une vitesse de grand-père."

(extrait de "Super gloupi" d'Edward VAN DE VENDEL et illustré par Fleur DER WEEL dont je parle et pour la suite duquel j'espère une traduction et édition française)

mercredi 12 juin 2013

La véritable histoire de Diego le jeune mousse de Christophe Colomb

Je suis très sensible aux pédagogies alternatives. Quel lien avec ce livre, me direz-vous? Et bien j'aime la notion de "living books" présentée par Charlotte MASON, enseignante britannique du début du XXème siècle et dont la philosophie de l'éducation est très répandue dans les famille en homeschooling (école à la maison). Les living books sont des livres écrits par un expert du domaine traité, un scientifique pour de la physique etc... mais aussi comporte une dose de vie. Les biographies font ainsi parti du lot.
La collection "Les romans images doc" de Bayard jeunesse répond en partie à cette attente. Les courts romans peuvent faire partie des premières lectures à partir de 8 ans et présentent la vie réelle, quoique bien réduite pour le format d'un personnage rentré dans la grande histoire par une petite porte. A travers les pages de cette histoire qui permet une vraie identification de l'enfant, il trouvera des focus documentaires succincts mais très clairs, avec des cartes et les dates importantes de la grande histoire concernée.

© Corinne VANDELET et Philippe MUNCH/ Bayard jeunesse

"La véritable histoire de Diego le jeune mousse de Christophe Colomb" de Corinne VANDELET et illustré par Philippe MUNCH nous entraine à la suite de ce fils d'aubergiste embarqué sur le navire de Colomb lors de son premier voyage à la découverte des Indes par l'Ouest et l'océan en 1492.
© Corinne VANDELET et Philippe MUNCH/ Bayard jeunesse

Diego découvre la vie de marin, à la dure mais protégé, vit aussi le manque de confiance en Colomb en étant témoin du complot contre lui. Puis, avec le célèbre explorateur, il découvre  les îles des Bahamas, San Salvador en particulier, puis Hispaniola (Haïti).
Ce ne sont pas des Indiens d'Inde, le choc des culture est évident: les espagnols veulent des richesses et les Taïnos, indigènes vivant en autarcie, sont pacifiques. Diego se fait un ami pendant l'aventure, Miguel le mousse de l'Amiral Colomb. Avec lui il découvre un peu plus du peuple autochtone grâce à Taïna, une jeune Taïnos.

© Corinne VANDELET et Philippe MUNCH/ Bayard jeunesse

L'intérêt est aussi ailleurs que dans le récit. L'exploration de Christophe Colomb est explicitée dans le texte mais les encarts sont très engageants, ils permettent d'aller plus loin dans le contexte historique mais aussi dans les connaissances de l'époque et la présentation des personnages célèbres.
Les explorations espagnoles et portugaises, les caravelles et une description du navire de Colomb, les instruments de navigation ou les indiens. Quelques mots explicatifs mais surtout des éléments complétant la vie du grand personnage et ouvrant la part d'histoire sur d'autres perspectives.
C'est un parfait compromis entre un léger documentaire très ciblé et une première biographie.

lundi 10 juin 2013

Une étoile dans le noir

Je voulais en parler il y a déjà quelques mois. Je voulais aller vite parce qu'il s'agit d'un petit trésor et puis je n'ai pas su quoi écrire. Je n'en parlerais peut-être pas mieux maintenant, tant pis, ce sera à vous de découvrir à quel point le livre va loin.

© Lucia TUMIATI et Joanna CONCEJO/ Editions Notari

"Une étoile dans le noir" de Lucia TUMIATI et illustré par Joanna CONCEJO est un livre jeunesse sans en être un. Il en a le format, presque les illustrations (encore que) mais le texte est dense, profond et les mots ont une sagesse.

Le narrateur, un jeune berger s'occupant des chèvres de la famille, nous parle de sa rencontre avec un autre enfant. Un garçon solitaire, avec des frères, vivant dans le même coin mais laissant perplexe, déstabilisant. Mais au fond, c'est un garçon comme lui, non?! Et bien non! Cet enfant semble un peu sot, plus lent, plus "distrait" à moins que ce soit dû à des préoccupations, une gravité d'adulte dans un corps d'enfant.
"Ce garçon qui parle comme un petit vieux me ferait presque rire, si ce n'étaient ces larmes qui lui coulent soudain et me laissent sans voix.
"Salut, je dois partir".
Il ne me répond pas. Il reste sous l'arbre à regarder dans le lointain."

A travers le quotidien du narrateur et ses discussions avec l'autre, un décalage devient flagrant. Les gestes du quotidien n'ont plus cette spontanéité du présent mais semblent juste une étape.
L'injustice de l'enfance, l'obéissance dû aux parents, le rôle parental sont ici sortis de leur résonance singulière pour prendre une autre plus universelle. La temporalité ne semble plus la même. Les actes n'ont plus les mêmes conséquences.

 © Lucia TUMIATI et Joanna CONCEJO/ Editions Notari

Le narrateur est juif, heureux de l'être, de fêter, de suivre les enseignements des rabbins. Il aimerait tout de même un décloisonnement mais son ami, lui, remet même en question l’œuvre de Dieu, parle de la loi juive, la respecte, mais semble vouloir la comprendre et évaluer ses erreurs, ses lacunes, les manquements de l'éducateur religieux.

La rencontre des deux enfants est un choc, une prise de conscience mutuelle.
Le narrateur est insouciant, juste dans l'instant et ces fragilités, situations ou frustrations. L'autre garçon semble responsable de plus que de lui, il est soucieux, sérieux. Il réfléchit à la justice, à la culpabilité, aux victimes et aux autres, au don, à l'amour exempt de souffrance, à l'obéissance attendu des enfants, au cycle de la vie, aux multiples vérités et au chemin guidé par les étoiles.
En observant la vie d'un enfant, l'autre garçon avance dans sa réflexion. Le narrateur lui semble être ici comme un garde fou, il est le témoin du désespoir de son ami et arrive, tant bien que mal, juste une fois à le faire devenir un enfant, juste un enfant, le temps d'un déguisement.
Le narrateur est témoin des fulgurances que son ami a sur l'avenir, d'une certaine omniscience mais aussi de ses premières paroles de sagesse voire même de ses premiers "miracles". Il entrevoit aussi le sacrifice, de Marie sa mère épouvantée, désespérée devant cet acte attendu du Père, de ce fils, conscient de la souffrance et du sacrifice qu'il endurera plus tard...

"Je repense à ses quelques mots et j'essaie de comprendre ce qu'ils voulaient dire vraiment, mais j'ai peur de trop bien comprendre, et donc de grandir trop vite."

© Lucia TUMIATI et Joanna CONCEJO/ Editions Notari

Le travail de Joanna CONCEJO est celui d'un impressionniste, ce sont des gestes, des détails,  des instants. Ils ne peuvent être que cela et plus encore comme le début d'une réflexion personnelle. Ces petits papiers collés avec les dessins monochromes ne sont juste que des pauses, avant de reprendre.
***
Bien-sûr il s'agit d'une enfance particulière, celle d'un homme destiné à être l'étoile dans le noir de beaucoup d'autres, vous l'aurez compris.

Merci infiniment aux éditions Notari pour votre confiance.

Les vers à soie


Toute leur vie dans une boite! Des maîtres sans cruauté,
Des générations, au seul fruit de leur labeur
Attachés, leur apprirent si bien à patienter
Que jamais ils ne bougent. Silencieux ils demeurent,
Fantômes de papillons, même quand sur leur prunelle
De jais tombe le soleil, ou la lune sur leur aile.

Regarde, c'est un jouet d'enfant! Et même pas fermé!
Qu'ils grimpent, qu'ils volent, leur arbre serait le monde entier;
Mais taisons-nous! se disent-ils, nous sommes prisonniers.
Comme personne ne vient leur parler de liberté
Ils ne sont pas libres, mais liés par des voix d'antan,
Dans un rêve trop profond pour des mots, ou le vent.

Même aux jeunes, pareils à de petits dragons verts
Qui rampent si pleins de vie sur leurs feuilles de mûrier,
On dirait que la voix a parlé: ils se terrent
Où ils ont à manger, où ils sont en sûreté,
File, file ton cocon, leur murmure la voix,
Dors, dors, tu seras bientôt enroulé en moi.

Quand du long sommeil vient le moment de sortir
Un dessin de feuilles orne leurs pâles ailes incurvées,
L'ombrage des arbres, de la lune un blanc soupir;
Et quand le lilas leur offre, par les nuits d'été,
Son nectar pour célébrer leurs noces, imaptients
Ils s'en enivrent, d'une si longue attente tout vibrants.

Ils s'agitent, songent à s'échapper, puis se rappellent:
Il est interdit, interdit de fuir jamais;
Les Mains veillent au dehors. Et tel le feu du ciel,
La voix ancestrale dit Non! Chacun se soumet.
La nuit appelle bien d'indicibles régals,
Mais la terreur est partout, immense, abyssale,

Et la tribu est là, où ils n'ont rien à craindre,
Ils vivent ensemble, doux et gentils, bien à l'abri
Tout trouve sa réponse au moment de s'éteindre
A l'orée de la mort, amants, amantes s'apparient,
Ce pincement de joie - les papillons convolent,
Leurs ailes duveteuses bourdonnent, ils rêvent qu'ils s’envolent.

Poème de Douglas STEWART 
(extrait de "L'homme qui court" de Michaël Gerard BAUER dont je parle là, traduit par David CAMUS et Dominique HAAS)
(source image: Gravure de l'Encyclopédie de Diderot et de Jean le Rond D'Alember, montrant les étapes de la sériciculture)

Le mystérieux cercle Benedict

Bon, il faut l'avouer, j'ai été attirée par la couverture de Carson ELLIS avant même la quatrième de couverture. Une seule illustration cependant, "Le mystérieux cercle Benedict" de Trenton Lee STEWART avait toutefois de quoi me harponner.


Une annonce parait dans les journaux: "Tu es un enfant? Tu possèdes des aptitudes exceptionnelles? Tu souhaites vivre une expérience unique?". Beaucoup d'enfants se rendent au concours. C'est déjà surprenant: les enfants ne lisent pas les journaux. Et puis les tests sont extrêmement compliqués: beaucoup essayent et seulement 4 sont choisis. Ils entrent dans une équipe d'espions menée par Mr BENEDICT et seront amenés à intégrer une pension pour orphelins tenue par Mr CURTAIN.
Nous suivons Reynie et ses copains Kate, Sticky et Constance. Ils vont devoir déjouer les pièges et mettre à mal un grand projet de contrôle de l'intellect humain.

Il s'agit d'un très bon roman d'aventures. Les épreuves sont à elles-seules de très beaux moments d'originalité où l'intelligence mais aussi la spontanéité, le caractère dégourdi et malicieux des enfants prennent tout leur potentiel. C'est fourmillant et plein de suspens.
Les personnages sont ici les pierres angulaires du roman. Le "Cercle Benedict" est un groupe d'enfants ordinaires et extra-ordinaires. Tout au long de l'aventure, les émotions enfantines, les attitudes et comportements sont au cœur des défis. Les enfants sont ainsi l'argile malléable, le potentiel à venir mais aussi la révolte.
Le lien entre les individus se créé de la solitude à la solidarité, à l'union. Du manque affectif à l'esprit critique.
Le roman parle aussi, d'une certaine façon, de la crise. De celle qui atteint les adultes, crise économique mais aussi démoralisation, déprime. Les médias mais aussi le manque d'esprit critique sont mis au pilori: la manipulation intellectuelle est possible. L'objectif du méchant scientifique CURTAIN est de prendre le pouvoir mais aussi d'atteindre l'homme dans ce qu'il a de plus cher.

Même si la fin m'a un peu déçue, les aventures trépidantes des enfants nous emportent volontiers. Le fantastique est ici doucement dosée et c'est avec plaisir que je suivrais la suite.

D'autres avis, le hérisson ici, ou ici.