dimanche 30 mai 2010

Dos de la langue: 12 essais d'insolitude

Pour continuer dans un clin d'oeil à Hambreellie, initiative A vous de lire (et de parler lecture), voici le même extrait, mis sur un autre blog. Un extrait lu et mis en scène, un passage joué par Jacques REBOTIER et Elise CARON.

Les 12 essais d'insolitude, extrait du "Dos de la langue" de Jacques REBOTIER:

Blanche forcée

Dans le cadre de lectures publiques sur le thème de la littérature québécoise, en 2006, j'avais lu aussi de Victor-Lévy BEAULIEU, « Blanche forcée ».

Job J Jobin, (surnom autoproclamé dès le début, le même que son grand père), océanographe en cours d’examens, se retrace les moments de vie de son couple formé avec Blanche, disquaire à Joliette. Job J cherche à comprendre quand et pourquoi sa relation a commencé à décliner.
L’avant avec ses amis où règne le désir (et le plaisir) en maître. Ses rapports avec son ex compagne, France, et sa fille Una…
Leur rencontre par l’intermédiaire de Mina, une amie commune, leurs premiers jeux érotiques, à trois (quatre…).
Les rapports troubles avec la famille de Blanche (sa mère, ses sœurs, le père, Charles décédé)… et tous les secrets réels ou fantasmés.
Les allées et venues géographiques, entre la rue St-Denis à Montréal (chambre de Job J), la rue St-Pierre à Joliette, la maison de Mattavinie. L’importance de la mer, des bateaux et la recherche des baleines (de « Ventre-de-souffre » comme quête fantastique) dans le méandre de leur relation. L’alcool comme un élément de leur relation.
L’héritage communicationnel venu du père de Job J, Jérémie j, et surtout du grand-père Job J (Jobin), vieux marin, mort d’un cancer.

Job J, en partant dans une quête de compréhension, nous distille pêle-mêle tous les moments de passion, contenus et précurseurs, de ses 3 années passées avec Blanche.
« J’essaie pauvrement de sauver les meubles, en fichant mes rapports avec Blanche comme j’ai toujours fait avec les baleines pour m’y retrouver "

Mon avis : récit à la première personne, fouillé, très haut en couleurs mais aussi quelque fois très alambiqué. Style déroutant, fait (je le suppose) de patois québécois.
J’ai été très touchée par cette écriture très imagée :« Blanche toute mollusque contre moi », « il y a du loup-garou dans le passé » et très « intellectuelle » (voire intellectualisante) : la première lecture (anecdotique) entraînant une seconde sur la description des rapports humains, de ses passions et de ses malentendus.
Il nous ai conté une histoire glauque, quoique sensuel…le récit pêche à mon avis par le rapport omniprésent du désir sexuel, ce qui laisse une impression en demi-teinte.

Fascination pour le corps et la relation sexuée (tous les actes) : j’ai été quelque peu déroutée par la quantité et la sensualité des descriptions. Elles n’arrivent pas à être obscènes (quoique ! par leur répétition et pour certaines) mais elles sont tout de même trop présentes, comme une architecture même de la relation affective (était-ce nécessaire d’en faire une névrose ?).
Le sentiment amoureux y est décortiqué: être « existant » pour l’autre (nécessaire comme « une pincée de tabac au vieux serpent de mer »), le rapport au corps, la communication (et ses silences) et le décryptage de la fin d’une relation.

Suggestions de pages à lire :
Les trois premiers § de la page 11 comme une présentation du couple
Pages 65-66 : « De l’ignorance….petite île » au sujet de leur rencontre
Pages 113-114 : ….le piège de la tente bleue s’étant refermée sur elle » pour avoir une idée des caractères de Job J et de Blanche
Pages 166-167 : moments de bonheur et malentendus

Les émois d'un marchand de café

J'avais préparé cette fiche de préparation à des lectures publiques dans le cadre d'une journée sur le thème du Québec, en 2006. Une amie bibliothécaire avait demandé des volontaires pour lire et préparé de quoi savourer « Les émois d’un marchand de café » de Yves BEAUCHEMIN.
Mr Guillaume TRANCHEMONTAGNE, cinquantenaire divorcé, propriétaire de sa société de vente de café, vit seul dans une grande maison tenue par sa gouvernante. Il travaille avec ses enfants et semble heureux de son parcours.
Le passage à l’hôpital pour une banale opération va remettre en question ce petit « confort ». Mr TRANCHEMONTAGNE commence une réflexion sur lui-même, sur sa vie et décide de réparer les erreurs du passé. Il en espère de la satisfaction et une tranquillité d’esprit qu’il n’a plus.

A la suite d’un concours de circonstance, une jeune femme et son enfant vont profiter de son changement de cap : il va les héberger sans rien demandé en échanges. C’est le début des actions rédemptrices de Mr TRANCHEMONTAGNE : rembourser son ex associé lésé suite à une transaction financière, retrouver et nouer des relations avec sa fille née hors mariage d’une liaison avec une de ses employées, éclaircir ses relations avec son ex-femme et lui affirmer une dernière fois l’affection qu’il lui portait….
Son ami, Raoul MARLEAU, et ses enfants, Antonin, Marie-Louise et Julien, vont chacun à leur manière essayer de le dissuader, ne sachant pas que penser d’un tel revirement de situation. Loin d’être simple, cette envie de faire le bien va exacerber les remords, rancunes et autres petites mesquineries de son entourage. Les nouvelles priorités de Mr TRANCHEMONTAGNE vont le faire passer par une quête de la bonne action et une réflexion sur la nature humaine.
C’est un petit chambardement qui s’opère : des choix professionnels, des relations parentales mises en exergue, de nouvelles relations amoureuses… des doutes sur le bien à faire et à se faire.

Mon avis : une lecture simple, très agréable et une histoire qui nous fait passer par des situations tendres, ironiques, cocasses sans jamais tomber dans une réflexion prétentieuse ou mièvre de la bonne conscience/action. On se laisse aller (avec bonheur) à suivre les changements d’humeur de ce quinquagénaire de plus en plus sympathique.

Plus précisément, la notion du bien est décrite moins sous une vue humanitaire que par son double de doutes, de fragilités… Cela remet en cause la satisfaction normalement indue d’une telle attitude, et plus pernicieux, le regard d’autrui considérant qu’un comportement ouvertement bon ne peut être qu’un symptôme de folie ou de lâcheté ou qu’une entourloupe d’un manipulateur avisé.
C’est tout de même une vision simpliste : qui dans le fond nous fait croire qu’il suffit de réparer ses erreurs même 10 ans après pour se racheter une bonne conduite. L’homme en est devenu sympathique mais ses actes passés ne sont pas pour le moins excusables (ce n’est d’ailleurs pas induit dans le livre).
Un très bon panel de situations père/fils ou fille : de quoi réfléchir sur le rôle du père, la qualité des relations, l’honnêteté dans les rapports. Une approche des rapports humains, entre rapports de force, mesquineries, envies, rancœurs et affection. La place du travail dans l’épanouissement humain.
Suggestions de pages à lire :
Pages 19/20 : Mr TRANCHEMONTAGNE compare sa vie à une toile cirée (des tâches qui ne se voient pas)
Pages 34/35 : une idée de la quarantaine
Pages 144/145 : Mr TRANCHEMONTAGNE découvre que ses enfants l’espionnent et savent qu’il est parti en voyage pour une affaire de très grande importance. Rapport de force au téléphone entre le père et son aîné.

Fiches de lecture, de pré-lecture publique


Depuis mes premières lectures adolescentes, j'ai aimé écrire sur le livre lu. Je ne peux pas dire avoir adoré faire des fiches de lecture scolaires mais l'idée de laisser s'évanouir à tout jamais les émotions ressenties (ou du moins jusqu'à une prochaine lecture) me tétanisait. J'ai eu aussi peur de ne pas retrouver ses frissons, ses vibrations. D'une lecture à l'autre, d'un même livre, une différence apparait, minime ou flagrante. Je grandis, muris, vieillis. Je ne suis pas touchée par le même thème ou le même déroulement d'une histoire. Là, j'ai aimé être embarquée, là ce passage m'a aidé dans ma construction.
J'ai toujours écrit sur le livre. J'avais un temps noté les citations, qui perdaient leur sens sorties de leur contexte si littéraire, si "charnel" de la lecture. J'ai aidé aussi des bibliothécaires dans les préparations aux thèmes à promouvoir, en préparation à des lectures publiques... les deux billets qui suivent viennent de cette période, lecture à voix haute de littérature québécoise en 2006. Et puis, souvent, je choisis un livre en lisant l'avis des libraires ou bibliothécaires (quand ils ne se contentent pas d'un "super" ou "très belle lecture").

jeudi 20 mai 2010

Le petit prince


"- Cette nuit... tu sais... ne vient pas.
- Je ne te quitterai pas.
- J'aurais l'air d'avoir mal... j'aurais un peu l'air de mourir. C'est comme ça. Ne viens pas voir ça, ce n'est pas la peine.
- Je ne te quitterai pas.
Mais il est soucieux.
- Je te dis ça... c'est à cause du serpent. Il ne faut pas qu'il te morde... Les serpents, c'est méchant. Ça peut mordre pour le plaisir...
- Je ne te quitterai pas.
Mais quelque chose le rassura:
- C'est vrai qu'ils n'ont plus de venin pour la seconde morsure...
Cette nuit-là je ne le vis pas se mettre en route. Il s'était évadé sans bruit. Quand je réussis à le rejoindre il marchait décidé, d'un pas rapide. Il me dit seulement:
- Ah! tu es là...
Et il me prit par la main. Mais il se tourmenta encore:
- Tu as eu tort. Tu auras de la peine. J'aurais l'air d'être mort et ce ne sera pas vrai...
Moi je me taisais.
- Tu comprends. C'est trop loin. Je ne peux pas emporter ce corps-là. C'est trop lourd.
Moi je me taisais.
- Mais ce sera comme une vieille écorce abandonnée: ce n'est pas triste les vieilles écorces...
Moi je me taisais.
Il se découragea un peu. Mais il fit encore un effort:
- Ce sera gentil, tu sais. Moi aussi je regarderai les étoiles. Toutes les étoiles seront des puits avec une poulie rouillée. Toutes les étoiles me verseront à boire...
Moi je me taisais.
- Ce sera tellement amusant! Tu auras cinq cents millions de grelots, j'aurais cint cents millions de fontaines...
Et il se tut aussi, parce qu'il pleurait...
- C'est là. Laisse-moi faire un pas tout seul.
Et il s'assit parce qu'il avait peur.
Il dit encore:
- Tu sais... ma fleur... j'en suis responsable! Et elle est tellement faible! Et elle est tellement naïve. Elle a quatre épines de rien du tout pour la protéger contre le monde...
Moi je m'assis parce que je ne pouvais plus me tenir debout. Il dit:
- Voilà... C'est tout...
Il hésita encore un peu, puis il se releva. Il fit un pas. Moi je ne pouvais pas bouger.
Il n'y eut rien qu'un éclair jaune près de sa cheville. Il demeura un instant immobile. Il ne cria pas. Il tomba doucement comme tombe un arbre. Çà ne fit même pas de bruit, à cause du sable."
(extrait "Le petit prince" d'Antoine SAINT-EXUPERY)

Fais (- toi rire, - pas le singe, -pas le clown, -toi peur, -ci fais pas ça)

Christian GUIBBAUD présente une collection de "livres-surprise à taper, embrasser, chatouiller, crier".

© Christian GUIBBAUD/ Milan jeunesse

Christian GUIBBAUD propose des livres à volets, sur chaque double page un personnage complice indique la consigne et montre l'action, la page en face montre le changement opéré après ouverture du volet. Les références aux contes sont nombreuses (les trois petits cochons, le chaperon rouge, la belle au bois dormant, boucle d'or, Ali baba...) et les fous rires, cris et gesticulations garantis. Dans la collection totale les actions se répètent (crier pour faire peur, tendre la main ou le doigt, caresser, gratter, chatouiller, grimacer, dire au revoir) mais les effets diffèrent alors la répétition n'apparait pas et la satisfaction arrive même après la lecture des 5 livres.
Les graphismes simples et ludiques apportent aussi leur touche de fraicheur et les provocations adorées (nous sommes empuantis par l'effluve d'un putois, rouge de voir des fesses d'un macaque, en sursaut de se faire arroser...).

"Fais-toi rire"
met l'accent sur l'effet comique des situations, il lui faire faire rire, être surpris, faire des grimaces, changer les animaux.

"Fais-toi peur" parle des petites frayeurs, des sursauts et montre les méchants (ogre, loup, sorcière, fantôme) sous un jour différent. Il lui est demandé aussi de faire peur.


© Christian GUIBBAUD/ Milan jeunesse

"Fais pas le singe" permet de faire des actes répréhensibles en toute permission (crier, gratter, chatouiller, faire des grimaces).


© Christian GUIBBAUD/ Milan jeunesse

"Fais pas le clown" reprend beaucoup de référence et lui demande de réciter quelques phrases pour déclencher le changement.

"Fais ci fais pas ça" joue sur les contraires, une action implique un changement.


© Christian GUIBBAUD/ Milan jeunesse

Le résultat est une lecture assidue, peu silencieuse, très gaie. Les enfants peuvent ainsi faire la différence pratique et tactile du contact (chatouiller, gratter, frotter, caresser, taper), du niveau sonore (pour faire peur, pour parler) et aussi, par mimétisme et lecture du schéma corporel du complice, comprendre les consignes et agir. Une très belle proposition de théatralisation et de développement de leur confiance en eux.

mercredi 19 mai 2010

Monsieur Hippopotame

Un ami m'a avoué qu'il voulait être lutteur de sumô.
Moi, je suis contre son idée.
Parce que c'est une idée trop facile.

(extrait de "Monsieur Hippopotame" de Shuntarô TANIKAWA et illustré par Gen HIROSE)

mardi 18 mai 2010

Petit lapin stupide

Bon, voilà! C'est comme cela que ça se passe quand un auteur me plait, j'ai envie de le suivre, et en plus quand l'éditeur met la clef sous la porte, j'achète. J'ai donc reçu "Petit lapin stupide" de Edward VAN DE VENDEL et illustré par Gerda DENDOOVEN.

© Edward VAN DE VENDEL et Gerda DENDOOVEN/ Être

Et il est question de la mort. Quel concours de circonstance mais, quelque fois, je crois qu'il n'y a pas de hasard. La mort est dans nos vies en ce moment, pas forcément au quotidien, mais elle touche de près un être cher alors j'avais choisi le thème pour d'autres livres, là le livre est arrivé à moi. Oui mais voilà ce livre est un bijou.
Vieux lapin va mal et Grand lapin ne veut plus répondre aux questions de petit lapin, alors oust, il le met dehors.
"Petit lapin doit la fermer.
Plus une seule question.

Pas maintenant!
Ce n'est tout de même pas difficile, a dit Grand lapin.

Petit lapin peut rester mais en silence."
Hors du terrier, petit lapin stupide rencontre des animaux tout près de mourir. Par naïveté, petit lapin stupide pose des question pas si stupides. Au poussin tombé du nid, au crapaud trop sec, à la souris grise trop souvent mère et au hibou sanguinaire. De chacun il découvre la vision de la mort. Puis enfin satisfait des réponses qu'il reçoit à sa demande qui lui bouillait dans tout le corps, il revient en courant au chevet de Vieux lapin, aidant au retour chaque mourant rencontré.
© Edward VAN DE VENDEL et Gerda DENDOOVEN/ Être

Les discussions sur la mort ont apporté de nombreuses notions autour du concept, des indices de reproduction avec un image terrifiante de la mise au monde, une idée de la retour à la terre, dans un nid recouvert ou dans le noir et la poussière mais aussi une référence à la chaine alimentaire.
Le livre est fort, puissant, prenant, poétique mais pas tout doux, il est même philosophique. Certains lecteurs sensibles pourraient être touchés, je pense surtout par l'idée de pouvoir mourir d'avoir eu trop d'enfants. Mais ce serait dommage de passer à côté de ce livre, à l'opposé de certains autres que je peux aussi aimer, plus provocants, jouant avec un petit côté glauque, ici rien de très choquant au fond: la mort peut y être attendue, douce ou juste réelle. Comme chaque lecture sur ce thème, la lecture accompagnée peut offrir une multitude de superbes moments et de belles réflexions.
Grand lapin forçait Petit lapin stupide a se taire, à garder en lui ses questions sur la mort. Grâce aux rencontre faites hors du terrier Petit lapin stupide a pu recevoir des réponses franches et peut maintenant accompagner la mort de Vieux lapin... comme une compréhension sommaire qui aide au deuil. Edward VAN DE VENDEL est vraiment un auteur à suivre. Je l'avais découvert avec "Un million de papillons". Je ne peux que confirmer sa manière de parler aux enfants sans ambages, avec justesse et poésie. Je suis aussi devenue une fan de son "super gloupi", j'en reparlerais bien sûr.

© Edward VAN DE VENDEL et Gerda DENDOOVEN/ Être

Et puis les illustrations sont belles, très colorées et poétiques. Je continue à adorer les aplats de Gerda DENDOOVEN. Le texte est très fort et les illustrations apportent une simplicité, juste une image, douce ou plus violente, elle aussi assez franche mais très en accord. J'aime aussi les signes de ponctuations (points d'interrogation) qu'elle y met et cette ombre de Petit lapin stupide, quasi indépendante et l'ombre de la mort.

L'avis du matricule des anges vous donnera encore plus envie de courir l'acheter.

vendredi 14 mai 2010

Ma maman à nous

© Gerda DENDOOVEN/ Être

C'est vrai que ce n'est pas par actualité des fêtes que je me suis ruée sur ce livre. La fête des mères approche et ce livre répond tout à fait à la demande. Mais c'est pour me procurer les livres des éditions Être (qui ferment, je vous l'indiquais là), que je l'ai vraiment regardé.

"Ma maman à nous" de Gerda DENDOOVEN est une très belle proposition.

Un petit garçon facétieux nous présente sa maman. Loin de la consensuelle jolie, douce et organisée maman des contes, ici la maman est dans la spontanéité, la joie et non l'apparence.
Elle n'a peur de rien, se joue des facéties de son fils et du papa, s'acharne à bricoler, porte "ses" hommes pour les convier à prendre l'air et marcher. Ce n'est pas du doux, du moelleux, c'est de la passion, la joie d'être ensemble, la "rage" de vivre.
"Elle rêve de sauvage, de féroce. Alors, je grogne des Grrr, des Rouaaaarrrh, des Crrrrr. Effrayée, elle se cache en bousculant tout et hurle: VOILA LA BÊTE QUE J'AIME LE PLUS!"

© Gerda DENDOOVEN/ Être

Elle n'est ni la plus belle ni la plus douce "Ma maman est grande et douce et chaude", même si c'est sur sa forte poitrine que le garçon se sent le plus en sécurité... il imagine aussi ce qu'elle peut bien faire la nuit quand lui et son papa dorment. Il souhaite lui faire plaisir mais qu'est-ce donc que les fleurs de la passion? Sont-elles roses ? Ou sont-elles les baisers qu'elle envoie à son papa ? © Gerda DENDOOVEN/ Être

Autant dire que je m'y retrouve assez (il est aussi question de thé ;)) et que les mamans ont une corpulence si proche de la mienne, un peu de néerlandais et de (ré)confort : pas la plus belle et échangeable... juste un jour ou deux !).

© Gerda DENDOOVEN/ Être

Mais ce n'est pas pour cela que le livre est bien. Les illustrations me plaisent (même si au début j'étais sur la réserve), c'est ce texte, cette prise de position, plus brute sur la parentalité, qui a eu mon aval le plus complet (au point de commander les autres livres de cette auteure). Une sorte de versant à "Max et les Maximonstres" de Maurice SENDAK : une maman mangeant son enfant, aimant les sauvages etc...

"J’ai conscience que ce n’est pas un livre pour enfants mais surtout un livre pour les mamans. J’ai fait ce livre car ce n’est pas évident d’être une maman." nous dit Gerda DENDOOVEN dans ce long interview fabuleux aux livres au trésor. Oui mais c'est si authentique que les enfants seraient bien à même de le lire.

19/24

mercredi 12 mai 2010

Billy Brouillard, le don de trouble vue

© Guillaume BIANCO/ Soleil

Vous ne connaissez pas encore ce garçon, allez, vous êtes sûr!

Le voilà...

Pub Billy Brouillard animation b&c from B&C on Vimeo.

dans cette première histoire là et je vous parle de la suite très vite, oui, oui, promis.

Edition "Être" en train de mourir et envie de promouvoir la littérature jeunesse "engagée"

Le monde de la littérature jeunesse m'interpelle depuis assez peu en fait. Enfant je n'ai pas eu beaucoup de livres spécifiquement jeunesse. Avec la parentalité, la bibliothèque jeunesse s'est mise à gonfler et puis des lectures, des écrits, des illustrations et encore des lectures plus tard je me suis prise d'affection pour ces livres destinés à notre force vive, au potentiel humain, aux enfants. J'aime les livres où l'enfant est considéré comme un être source de réflexion, en devenir certes, mais pas idiot.
Au Salon du livre de Paris 2010, j'avais acheté certains livres des éditions Être... avec admiration, j'avais rencontré et écouté l'éditeur me parler avec fougue et passion de ses livres. Je vous recommande "L'atelier des papillons" par exemple et tous les livres de cette maison d'éditions, j'en billeterais d'autres sous cette catégorie Être.

"Le risque ou dormir

C’était l’anagramme de mon ancienne maison d’édition
Le Sourire qui mord

Invité à débattre sur le thème « Résister, à quel prix ? » lors de la journée professionnelle organisée le 7 mai 2010 par la Fête du Livre de Villeurbanne, j’ai d’emblée, à la demande de Gérard Picot qui venait de l’apprendre, annoncé publiquement l’arrêt prochain des éditions Être.

Éditer depuis plus de trente-cinq ans, sans capital, des albums jeunesse singuliers plutôt exigeants a toujours relevé de l’aventure. Et sans le soutien attentif de nombre des partenaires de la chaîne du livre, les lois du marché auraient eu raison plus tôt de cet équilibrisme.

En des temps qui ne sont faciles que pour quelques nantis, qu’un léger fléchissement de la vigilance professionnelle puisse nous être fatal a pourtant suscité l’émotion. J’ai été très touché, sur place et depuis, par les nombreux encouragements à tenir et par l’engagement de ceux qui ne pouvaient se résoudre à ce que la présence de nos livres dans le paysage éditorial aux côtés des lecteurs jeunes et moins jeunes, ne soit pas assurée. Que faire ?

Je ne peux que vous inciter, les uns et les autres, à vous précipiter dans vos librairies préférées pour vous procurer les albums d’Être éditions pendant qu’il en est encore temps. Si une vague d’achats ne garantit peut-être pas la poursuite de l’activité, elle assurera un destin à des livres qui considèrent les enfants comme des lecteurs à part entière méritant des points de vue non altérés sur le monde. Qu’ils puissent encore, ces albums, susciter de libres interprétations et la résistance à l’ordre des choses, je nous le souhaite. Et nous le devons aussi aux créateurs qui ont partagé le risque de ces aventures littéraires et humaines....

« Ce qui vient au monde pour ne rien troubler ne mérite ni égards ni patience » écrit René Char.
Je vous remercie de la vôtre.
Et je n’ai pas sommeil…

Christian Bruel
10 mai 2010
contact@etre-editions.com

Être éditions
56, rue Ramus
75020 Paris
http://www.etre-editions.com/

Rejoignez le groupe de soutien à Christian Bruel sur facebook :
http://www.facebook.com/group.php?gid=120683554618391&v=wall "
via la boite à thé

... et que dire de ces auteurs/illustrateurs qui n'arrivent plus à vivre de leur autonomie créatrice, de leur envie d'une littérature jeunesse différente et intelligente, Thierry DEDIEU m'avait vraiment sensibilisée et stupéfaite aussi par ce manque de vente... J'avais envie de le rencontrer par ses pages interposées, alors j'ai vite commandé "Dieux" créé avec son compère Thierry MURAT.

Achetez de la littérature jeunesse, ne vous arrêtez pas aux grandes lois du marché et de la publicité!

Inuk est amoureux

© Carl NORAC et Martine BOURRE/ Pastel

"Inuk est amoureux" de Carl NORAC et illustré par Martine BOURRE est arrivé doucement à la maison. Je l'avais déjà regardé et reposé, pensant avoir affaire à une histoire jolie mais simple... et c'est vrai que mes choix de livres jeunesse sont aussi des choix d'adulte.
Et puis j'aime beaucoup ces univers de glace, alors pensant y retrouver comme un conte, je l'ai ramené. Inuk est amoureux de Lucy. Elle a le don de lui parler d'une manière qui le remplit de bonheur, de chaleur. Mais Lucy est née avec un bec de lièvre et la société se rit d'elle. Inuk change de vie et pour rendre la confiance à sa belle, lui prouver sa beauté, va jusqu'à la montrer à la face du monde avec ses sculptures. Quelle belle idée du bonheur comme une vie en adéquation avec ses sentiments.

© Carl NORAC et Martine BOURRE/ Pastel

Carl NORAC fait encore mon bonheur. Le texte n'est pas simpliste, il est fin, sensible et toujours avec des nuances thématiques. Ici la culture inuit est reprise aussi dans la description de la neige: "Les flocons sont si gros qu'ils font ploc. On dit ici qu'il tombe des peaux de lièvres." L'histoire douce se remplit de ces nuances tactiles, sensibles: l'amour comme de la chaleur dans la tête, l'amour comme une extrapolation de l'avenir, ces mots comme de émerveillement.
Et puis ces sculptures, une approche de tout l'art inuit par un biais, ce biais d'une femme mais aussi des personnages sacrés: Sedna déesse sirène, homme oiseau... Je ne peux aussi qu'approuver à cette vision de la beauté autrement, avec d'autres critères, pas l'esthétique pure mais bien ce que cette personne a avec tous ses qualificatifs (avec de telles lèvres, ses mots semblent plus doux). Mais c'est un peu faux aussi, l'esthétique est là : les formes sculptées de la femme prouvent bien qu'à chaque morphologie, unité corporelle, il suffit de changer son regard pour y découvrir une beauté que l'on redemande.

© Carl NORAC et Martine BOURRE/ Pastel

Les illustrations de Martine BOURRE sont très belles, de ces teintes bleues, jaunes et blanches comme les miroitements de la lumières sur la neige. Les personnages sont presque flous comme si la luminosité nous imposait de cligner les yeux. Les formes arrondies sont faites de lignes lisses et d'autres pellucheuses de fourrure. C'est une superbe illustratrice du froid et elle le prouve dans "La femme phoque" dont je vous parlerez plus tard. "Je m'inspire souvent des formes lisses et rondes de ces belles sculptures inuit qui expriment si bien l'imbrication du monde des hommes avec celui des animaux." nous dit-elle, c'est réussi!
J'aime aussi ces paysages, eux, plus coupés au couteau, une horizon neigeux presque brumeux et des habitations nettes, brutes.

© Carl NORAC et Martine BOURRE/ Pastel

Ce livre a aussi un très beau prétexte: un hommage au sculpteur Johnny INUKPUK, amoureux d'une femme au bec de lièvre qui sculpta toutes ces femmes avec cette "difformité".

*source Johnny INUKPUK

18/24

vendredi 7 mai 2010

Eco, La Malédiction des Shackelbott (tome 1)

© Jérémie ALMANZA et Guillaume BIANCO/ Soleil

« Eco, La Malédiction des Schackelbott tome1» de Jérémie ALMANZA et Guillaume BIANCO se devait de passer entre mes mains.
Avec l’impression que m’avait laissée « Billy brouillard », je voulais continuer à aller dans la sensibilité de l’auteur BIANCO. Encore là, il nous offre avec son compère un livre qui sort des sentiers battus. Pas de mièvrerie, un propos très sérieux sous un petit conte en plusieurs parties.

© Jérémie ALMANZA et Guillaume BIANCO/ Soleil

Eco est une enfant laissée seule chez elle par ses parents, les Schackelbott. Ils sont bien présents dans cette énorme demeure mais sont très occupés. Ils confectionnent de superbes habits pour les personnes renommées et accordent un temps très limité à leur fille choisissant juste de la gâter par de multiples présents.
Eco s’ennuie, son environnement semble inadapté à ses désirs de petite fille. Il est « trop propre, trop froid, trop bruyant, trop organisé. Aucun dessous de table obscur où se réfugier pour jouer, aucun angle poussiéreux où se cacher pour épier… » Aucune activité ne lui est proposée jusqu’au jour où, son père trop occupé, lui demande d’aller livrer 3 poupées magnifiques, création des Schackelbott, au Ministre. Seulement elle ne choisit pas le même parcours que prévu avec son chauffeur et rencontre sur le chemin une vieille dame et son enfant, mendiante en haillon. Eco stupéfaite de cette misère financière et humaine va leur offrir les poupées. La vieille femme lui donne en échange 4 amulettes, des babioles supposées avoir des pouvoirs infinis. Eco est aussi persuadée d’avoir affaire à la femme du magicien des nuages, sorte de sorcière déguisée pour se rendre compte de ce qui se passe sur ces terres. Son geste va être l’élément brutal, le début du drame annoncé.© Jérémie ALMANZA et Guillaume BIANCO/ Soleil

Les commanditaires des parents se sentent méprisés et vont mettre en faillite les parents. Le père d’Eco devient loque, la mère hystérique et furie. Cette dernière maudit sa fille pour son geste, sa désinvolture et même sa filiation. La petite Eco se retrouve encore plus emmurée dans sa chambre, incapable de trouver un quelconque moyen de communication avec ses parents. Elle ne regrette pas son don mais cherche une solution. Eco convaincu du pouvoir des amulettes, les dispose dans des poupées de cotons de sa création et les offre à ses parents pour réparer l’outrage. Ses parents la dédaignent.

La malédiction s’opère, Eco se transforme. Mais seule, éperdument « emmurée dans ce cocon de soie, calfeutré tout au creux de ce petit monde », elle va trouver réconfort auprès de ces « doudous » de tissus, devenus miraculeusement vivants. Il y a Esope et 1 bulbe de cactus comme rein, Socrate et un cocon de ver à soie comme estomac, Epictète et un morceau de silex comme cœur et Diogène et une petite noix comme cerveau.

Ce début de conte nous amène dans une maison où l’enfance n’a pas sa place, les événements mais aussi la vie transforment la petite fille. Toutes ces métamorphoses l’effraient et ce sont ses impressions sans accompagnement qui marquent ici les moments les plus intenses, les plus violents. Les émotions et le corps sont mis en exergue.
J'aime aussi beaucoup cette réflexion sur l'éducation, l'offrande matérielle contre la présence et l'attention. Trop d'organisation, trop de maîtrise, pas de communication, pas de partage. Et ce n’est que le tome 1, qui finit sur une voie fantastique quand nous pouvons y voir toutes les réflexions sur la vie.

© Jérémie ALMANZA et Guillaume BIANCO/ Soleil

Les dessins en clair obscur de Jérémie ALMANZA sont magnifiques, les couleurs sombres nous amènent rapidement dans cet univers glauque et qui pourtant se veut féérique, plein de détails faits pour petites filles. Les débuts de chapitre dessinés par Benjamin BIANCO nous rappellent des passages du haricot magique comme pour nous rappeler que les contes sont tragiques. Au début, ce sont les illustrations du dessinateur de Billy Brouillard, qui tétanisent un peu. Au final nous nous rendons compte que sous la pâte veloutée de Jérémie ALMANZA, les frayeurs peuvent être très esthétiques.

« Il n’existe que des contes de fées sanglants. Tout conte de fées est issu des profondeurs du sang et de la peur. » Franz KAFKA

Allez donc lire le billet de Lily, qui vous donnera, à coup sûr, envie

jeudi 6 mai 2010

Le sculpteur de femmes

"Le scuplteur de femmes" de Lisa Bresner est un petit conte cruel.

Un jeune homme de 20 ans, Tianshi, tue femme après femme en les énucléant et terrorise la région. Sa mère, l’instigatrice de ses meurtres, souhaite aider la dépouille de son mari mort lors d’un retour de voyage qui a duré 42 jours a trouvé le chemin du paradis. Le jeune homme sculpte des visages de femmes et, dans l’argile, fait une orbite pour accueillir les yeux des défuntes. Le sanctuaire se trouve en haut du mont Kunlun, sur la tombe de son père. La dernière victime est désignée, c’est la fille du chasseur d’oiseaux de l’autre côté de la montagne.
Là, Tianshi se remet en cause : n’est ce qu’une affaire de religion ? Est-ce vraiment pour que son père, celui qui ne suit pas les croyances de ce « prêtre aux yeux bleus de la compagnie de Jésus », trouve la voie après la mort? Et que cache donc cette mère continuellement absente et autoritaire ?


« L’oiseau de Kunlun tend le cou
Les magnolias se fanent
Personne ne viendra au printemps
Il n’a pris que quelques pétales dans son bec. »


Ce conte qui pourrait paraître glauque est définitivement très poétique. Lisa Bresner nous parle d’amour conjugal et filial, de compromis amoureux, de mensonges ou de silence encore pire que des mensonges. Elle nous parle du plein et du vide, en sculpture comme ailleurs…
« Pourquoi n’avons-nous jamais appris à sculpter ? Est-ce que l’argile, les rochers, le marbre renferment des fantômes que nous ne devons pas réveiller ? La forme reste invisible à l’œil. Elle est blottie au plus profond du moindre caillou, si l’on casse le caillou pour trouver une forme, il ne reste que les éclats de caillou et la forme est brisée. Le vent et la pluie nous servent de burin et d’alliage. Chaque saison sculpte de nouveaux arbres, des fleurs différentes et des montagnes autres. Le temps se charge de les sauver. »


*source sculpture Catherine OLIVO

Lily offre un beau billet tout aussi mystérieux. Ne vous laissez pas aller aux idées noires qui pourraient échappées de mes lignes, des siennes et de la vidéo, faite par l’auteure elle-même pour accompagner/sublimer ce petit conte (présente chez Lily), et lisez le donc pour y voir tout le reste ! A certains moments, j'ai même cru qu'elle nous parlait de la Reine-Mère d'Occident Xiwangmu...
Lisa Bresner ne peut pas être réduite à ce roman, suivez donc le lien

Ne t'inquiète pas pour moi

Ce livre, « Ne t’inquiète pas pour moi » d’Alice KUIPERS, est arrivé par chez moi un jour, parce que je l’avais vu billeté ici et là et puis parce que la couverture, que dis-je, les couvertures me plaisaient. En y regardant de plus près, c’est du Marc BOUTAVANT, c’est évident. C’est autant un livre pour adolescents qu’un livre adulte, la couverture a changé pour le présenter dans un rayon et en même temps dans l’autre.
Il se lit en un clin d’œil, des clins d’œil dans une vie.
Des post-its sur le réfrigérateur, que cela, tout au long des mois. Des petits mots d’une maman pour son adolescente et vice-versa. Des indices du quotidien, liste de courses, indication quand aux repas susceptibles d’être partager, aux repas préparés pour celle qui rentre plus tard. La maman travaille à horaires décalés, comme gynécologue, et laisse sa fille adolescente souvent seule. Cette dernière essaye aussi de s’octroyer des moments rien que pour elle… et son tout nouveau petit copain.Des post-its dans le quotidien d’une famille monoparentale, anodins, superficiels et puis quelquefois moins. Au fil des mots la relation mère-fille se comprend, cette mise à l’écart l’une de l’autre, cette distance, ces envies d’être ensemble, ces conflits inter-génération. Et puis les mots se font plus intenses, la maladie est là, les contenus prennent de l’épaisseur. A travers le lapin Jeannot, dont il faut prendre soin, c’est de la relation qu’il s’agit.
Entre les mots, la thérapie, les astuces alimentaires, le courage, la féminité… le don de vie professionnel et le don d’une vie à sa fille.
Un très beau petit livre sur l’amour filial et les moments qui restent d’une relation. De quoi prendre courage et confiance en soi.

Le billet de Lily vous donnera encore plus envie. Merci encore Lily pour cette lecture.

Cerise griotte

*source Benjamin LACOMBE

mercredi 5 mai 2010

Les corbeaux de Pearblossom

© Aldous HUXLEY et Beatrice ALEMAGNA/ Folio Benjamin

« Les corbeaux de Pearblossom » de Aldous HUXLEY et illustré par Beatrice ALEMAGNA est une lecture classique pour enfants. Classique, au sens que ce texte, seul écrit pour la jeunesse de cet auteur, mérite le détour même s'il est plus ardu dans ses phrases et dans la peinture de moeurs.

Mr et Mme Corbeau vivent sur les branches d'un arbre. Voisin caché vit un serpent qui profite des sorties quotidiennes de Mme Corbeau à l'épicerie pour manger l'oeuf pondu du jour. Mme Corbeau s'en rend compte par hasard.
« Monstre ! s’exclama-t-elle. Que faites-vous là ?
- Je prends mon petit-déjeuner, rétorqua le serpent la bouche plein, avant de regagner son trou. »

© Aldous HUXLEY et Beatrice ALEMAGNA/ Folio Benjamin

Effrayée, elle en parle à son mari dès son retour du travail. Mr Corbeau va demander conseil à Vieux hibou, un voisin plus sage (quoique). Ensemble ils vont jouer un mauvais tour à cet odieux serpent.

Ce texte a été écrit pour une enfant de la famille de l'auteur. Et c'est assez marquant de voir un quotidien, de classe, présenté de la sorte: jours travaillés, répartition des tâches, décision prises par les hommes. Il semblerait aussi que le lieu géographique soit le lieu de vie réelle de cette petite fille. Il y a toute une satyre dans ce petit conte. Il fait grincer des dents sur cette mise à l'écart de Mme Corbeau (qui parle trop et à qui on demande de fermer le bec), juste bonne à pondre et tenir le nid, et ce Corbeau, Mr, qui lui décide et s'accorde un temps privilégié, entre "hommes", avec son ami.

© Aldous HUXLEY et Beatrice ALEMAGNA/ Folio Benjamin

Ce n'est pas un texte simple, presque pas pour enfant, il est long et "plein". Mais même avec cette difficulté et même si l'égalité homme/femme (enfin Mr et Mme Corbeau) n'est pas une évidence, l'histoire offre une ingéniosité de la solution trouvée. Et nous rirons des effets comiques (peut-être de grands) et des petits détails : le serpent « se lécha les babines (sa maman ne l’avait pas très bien élevé)», les "hommes" dinent et papotent autour du journal sans faire attention à Mme Corbeau, ils peaufinent leur vengeance et se rient des affects de la belle aux plumes noires, le hibou se rase . La morale de l'histoire, pour le serpent, est aussi assez cynique mais permet de bien se venger des "tracas" de la vie.
Les illustrations de ALEMAGNA, toujours en "puzzle" et en patchwork de texture, proposent une vision moins serrée de l'action. Elles sont toujours une raison d'aimer encore plus le texte accompagné.

17/24

Ici l'avis d'Eolune
un autre avis plus complet sur la forme et le contexte

L'atelier des papillons

©Gioconda BELLI et Wolf ERLBRUCH / Etre

« L’atelier des papillons » de Gioconda BELLI et illustré par Wolf ERLBRUCH est une petite histoire plus complexe qu’elle en a l’air.
« Il y a très longtemps, les papillons n’existaient pas. Comme nombre de plantes et d’animaux, ils attendaient d’être créés. C’était là le travail des Inventeurs de Toutes Choses. Mais le règlement de la Création était formel : ils devaient créer la végétation nouvelle et les bêtes encore inconnues sans jamais mêler la faune et la flore. »
Nous découvrons ainsi le monde des inventeurs, la Vénérable, les Maîtres inventeurs et les différents groupes d’inventeurs orientés vers une spécificité. Rudolfo, jeune inventeur utopiste, veut mêler la beauté dans ces créations et cherche à inventer un « être qui volerait comme un oiseau et serait aussi délicat qu’une fleur ». Avec ses amis, il est attribué à la création des insectes, un département un peu empoussiéré, peu avenant et mal reconnu. Mais Rudolfo est têtu, en plus des autres insectes inventés, il cherche encore et toujours à inventer son œuvre la plus magistral.
Les régions sont si particulières pour que les inventeurs soient en condition pour inventer (le froid pour inventer la fourrure de l’ours polaire). La beauté est toujours là pour inspirer. Les détails de la faune et de la flore prennent ici d’autres significations.

©Gioconda BELLI et Wolf ERLBRUCH / Etre

Il est aussi question de beauté : beauté des choses ou philosophie de vie comme beauté. Rudolfo veut offrir plus de beauté au monde. Les choses créées, une chèvre, un chien, ou les éléments le vent, la foudre, lui prouvent l’éphémère du beau, la beauté dans l’instant. Mais Rudolfo persiste pour inventer même quelque chose d’éphémère mais une beauté pour tous. « Ce que j’aime avec la beauté, c’est qu’elle ne renonce jamais ; voilà pourquoi elle est immortelle ».

©Gioconda BELLI et Wolf ERLBRUCH / Etre

Et puis les illustrations de Wolf ERLBRUCH apportent toujours ces nuances de matières, une manière de mettre le réalisme comme une recréation. J’ai aimé cette faune et flore avec des matières d’humain (papier journal écrit, trame de tissu) et ce sceau asiatique qui apparait sur certaines planches. Le texte étant assez dense, les illustrations ont leur légende pour retrouver l’extrait qu’ils accompagnent.

Livre lu dans le cadre du Challenge Lectures d'école.

mardi 4 mai 2010

Arbre Gond

*source Durga BAI

... illustratrice indienne découverte à la lecture de "Un, deux, trois... dans l'arbre" de Anushka RAVISHANKAR, Sirish RAO. Des animaux taquins et coquins vont chacun à leur tout grimper dans un arbre: 1 pou, 2..., 3... pour donner un arbre plein de vie à la fin et une interaction mathématique dont je parlais-là.