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jeudi 23 juin 2011

Le Petit Chaperon rouge ou La Petite Fille aux habits de fer-blanc

© Jean-Jacques FDIDA et Régis LEJONC/Didier jeunesse

Dans mon optique de ne pas fournir de conte simplifié à notre lutin (il a aujourd'hui 4 ans 1/2), je n'avais pas encore acheté de contes classiques. Pas de Perrault, pas de Grimm, pas d'Andersen (euh sauf un). J'attendais de lire le texte original et de permettre au petit d'homme de découvrir non édulcorées ces histoires orales. Dans cet optique, et pour ne plus le laisser dans "l'ignorance des classiques", ma libraire m'a présenté cette collection "Contes du temps d'avant Perrault". Bien lui en a pris, mais là je crois que vais patienter un tout petit peu, mais vraiment tout petit peu, pour le lui lire.

Parce que oui les lectures que je lui propose lèvent certains pans obscurs dans la littérature jeunesse: nous lisons sur la mort, sur les dangers, sur les peurs etc... au risque de passer pour certains comme une "bibliothécaire familiale des tabous". "Le Petit Chaperon rouge ou La Petite Fille aux habits de fer-blanc" de Jean-Jacques FDIDA et illustré par Régis LEJONC est un superbe petit livre mais très très loin d'être aseptisé. Il faut le savoir.

Le parti-pris de nous offrir une version différente de celles de PERRAULT ou des frères GRIMM est une très belle proposition. Nous n'avons plus la censure sociétale de leur époques et nous apercevons, un peu, le langage cru d'avant... ces contes racontés pour l'exemple, le danger et la sagesse.

Alors oui, il y a bien un chaperon rouge, un loup et une grand-mère. Tout réside dans le duel mais aussi dans la saveur de l'enfance. Les habits de fer-blanc forment comme une entrave à la liberté et un obstacle à l'épanouissement sensoriel (voir même sensuel). La petite fille passe d'un habit protecteur, dissuadeur mais aussi foncièrement aseptisé, à une capeline rouge pourpre, une de celle qui attire, une de celle qui donne des envies.
Les choix sont alors là: celui d'un chemin de femme, celui d'une fuite. Mais les âges de la petite fille restent bien un destin: de petite à vieille, d'immature à mature, quitte à "manger les autres femmes de la famille" pour trouver sa place. Les aides ne sont pas tant extérieures (seules des mises en garde apparaissent de corbeaux ou de chat) mais le sursis, le sauvetage est bien celui d'une enfant qui devient une adolescente, une jeune femme.
Que dire, n’hésitez pas à le lire, pour vous, puis pour vos filles, vos garçons: une histoire dangereuse où il est de bon ton de narguer le loup, inconsciemment puis sciemment.

© Jean-Jacques FDIDA et Régis LEJONC/Didier jeunesse

Le texte est très rythmé et mérite vraiment d'être lu à vous haute. Pas de doute, Mr FDIDA est un conteur. Le vocabulaire est aussi très ancré dans une période, aux allures d'authenticité: pas de "mère grand" mais bien "ma Grand" entre autre.
Les illustrations de Régis LEJONC offrent un graphisme presque classique mais montrent bien cette part de sensualité derrière l'histoire, une forêt dangereuse, une ombre, et l'atmosphère devient épaisse.
Pour vous faire une idée encore plus complète n'hésitez pas à lire ce très beau billet là.

© Jean-Jacques FDIDA et Régis LEJONC/Didier jeunesse

Après cette lecture je comprends d'autant mieux les écrits de Francis GARNUNG dont je vous conviais la lecture de "La pomme rouge" et qui par "La clé des champs", entre autre, prouve tout l'aspect bien ambiguë de ce duel de l'enfance contre l'adulte, du bien pensant contre les dangers de la nature, de toute la sensualité (et sexualité) derrière tout cela.

samedi 2 avril 2011

Fumée

© Anton FORTES et Joanna CONCEJO/ OQO

"Fumée" d'Anton FORTES et illustré par Joanna CONCEJO est un album fort. Il ne se lit pas facilement, pas en raison d'un contenu flou ou pompeux, non, non rien de cela: mais bien par le sujet, les camps de concentration. Mais si les drames de l'Histoire ne vous font pas fuir de suite, que vous envisagez de les présenter à vos enfants, n'hésitez pas à lire ce livre, il est subtile, pertinent, difficile, très profond mais il permet d'accéder à cette part de l'histoire d'une manière extrêmement sensible.

Le texte est fort et marque la trame du drame. Ce sont des mots d'enfant, de ce fils qui a suivi ses parents en camp de concentration. Entre les lignes, ce sont tous les efforts d'une maman pour cacher le pire, pour préserver la vie, pour garder l'espoir.
Les détails de la détention (de juifs et de gitans) arrivent: l'alimentation où les pommes de terre ont presque plus de présence que les personnes, les médecins dont il faut se méfier, les conditions de vie, les échanges, les "travaux" et ces absences, ces disparitions.
"Nous dormons enlacés, serrés par les autres."

© Anton FORTES et Joanna CONCEJO/ OQO

Les illustrations de Joanna CONCEJO apportent énormément au livre. Ces croquis au crayon de papier apportent le côté éphémère des vies. Certaines ombres ne sont que des esquisses, en rouge, rose ou bleu. La végétation apparait aussi, comme une survivance de l'espoir, un pétale par-ci, un pissenlit là... même un cauchemar de dragon vert comme la verdure autour, le jardin d'avant.
Les habits sont plus marqués que les visages, les horreurs sont symbolisées et les "bourreaux" apparaissent comme des oiseaux de proies: au dessus, voyant tout.
"Je ne pleure jamais, parce que le bébé qui pleurnichait la nuit fut emmené, et sa mère n'arrête pas de cirer; et moi, je ne veux pas que maman crie."

© Anton FORTES et Joanna CONCEJO/ OQO

Le livre est bien-sûr magnifique, effrayant et permet de mettre en avant une part d'ombre de l'Histoire. A chaque parent d'expliciter doucement, au fur et à mesure, chaque détail. Pour que chaque vie ne soit pas juste une ligne, pour remettre des visages. Merci infiniment à Cristiana de La Boite à Thé de m'avoir susurrer ce titre.

© Anton FORTES et Joanna CONCEJO/ OQO

"A tous ceux qui ne se soumettent jamais à la vérité des vainqueurs."

lundi 28 mars 2011

Pourquoi j'ai tué Pierre

© Olivier KA et Alfred/ Delcourt

"Pourquoi j'ai tué Pierre" d'Olivier KA et illustré par Alfred est une lecture de santé publique.
Olivier est un garçon de 7 ans et à chaque étape de sa vie, il revient sur un contexte, une sensibilité, une éducation, une forme de vie qui nous explique pourquoi il a tué Pierre. Cette bande-dessinée est à lire absolument même par des lecteurs pré-adolescents, accompagnés de leurs parents. Le crime n'est pas celui que l'on croit, ou presque.
Olivier est élevé par ses parents et, pendant les vacances, va chez ses grands-parents. Il nous conte ses vacances, entre baba-cool attitude des premiers, religiosité des seconds et colonies. Il nous parle de l'avant, du pendant et de l'après... parce qu'il est question d'attouchement, de pédophilie.
Ce geste, cette infamie, cet acte émis par une personne de confiance. Pierre est un prête, homme de foi sorti du carcan, très proche des autres qu'ils soient ou non de la même confession. Forme d'autorité, il est aussi un homme modèle: bon vivant, à l'écoute, altruiste. Et puis il est entré dans la famille, en tant qu'ami, soutien d'éducation, responsable des vacances.

© Olivier KA et Alfred/ Delcourt

C'est de tout ce qui fait une proximité, une sensualité, une éducation sexuelle dont il est question dans ce livre. Olivier découvre la pudeur en même tant que la nudité comme forme de présence au monde. Il découvre les premiers émois mais aussi les gestes, les attitudes entre adultes et enfants.
La religion a aussi une place ici. Comme ordre établi, comme garant d'une moralité. Elle constitue une forme de contre-pied moral à une utopie "politique" de "peace and love". C'est ainsi une bonne part des approches de la sexualité aux enfants qui se retrace là.

© Olivier KA et Alfred/ Delcourt

Et puis il y a l'acte, pas explicité, pas accepté (et pas acceptable). Et c'est aussi la culpabilité de la victime qui choque, qui interpelle... un malaise qui se lit à tous les âges, le poids des traditions, des éducations, de l'affectif, cette non-trahison des sentiments.
L'histoire, réelle, a une fin. Elle seule mérite de relire le livre, de revenir découvrir les détails de cet attachement et de cet "acte de mort" particulier.

Un billet qui vous éclaira là, un autre superbe ici.