C'est avec plaisir que je retrouve cette auteure italienne. "L'île du temps perdu" de Silvana GANDOLFI est un court roman plein de douceurs et de vivacité.
Deux enfants, Giulia et son amie Arianna, se perdent dans une mine lors d'une sortie scolaire. Dans le noir, puis sur l'île. Un volcan expulse sur ces pentes tout ce qui a été perdu sur terre. Elles comme les objets, elles comme les monuments, elles comme les musiques pas encore écrites, elles comme les émotions.
Elles rencontrent les enfants habitant l'île. Passablement gentils jusqu'à ce qu'ils poussent dans une crevasse un vieux grand-père désorienté lors d'une sortie de sa maison de retraite. Comment choisissent-ils ceux qui ont le droit de vivre et les autres? Il faudrait avoir envie de rester sur ce lieu magique, ne pas souhaiter retrouver sa vie d'avant. Mais ce n'est peut-être qu'un qui-pro-quo. Jour après jour, elles découvrent tous les habitant, les enfants, les adultes, les perdus pour tous même pour l'humanité et l'existence des atolls d'îles par zone géographique de lieux de perte.
Les repères temporels sont différents, pas de véritable nuit, pas d'heure mais les grondements irréguliers du volcan. Cela ressemble à un pays merveilleux. Sur cette île, ceux qui se sont perdus, ceux qui sont à même de paresser, de rêver, de perdre du temps, de perdre le temps. Il y a même dans les trouvailles autour du volcan des magnifiques émotions (espoir, patience, courage, mémoire) à se masser sur le corps contenus dans du plancton ou des lapilli volcaniques. Prendre soin de ses rêveries, de soi.
Le lieu est magique mais il est aussi voué à se détériorer. N'existe-t-il pas derrière le marais des cannibales? Humains perdus comme tous mais ayant respiré près de fumerolles toxiques, le temps noir. Apathiques, se mangeant les uns, les autres, même eux-même. Le gaz ne serait-il pas en train de se répandre? Le marais les séparera-t-il toujours? Mais le monde réel est le pire dans ce désastre annoncé.
"[...] toutes ces fumerolles correspondent à du temps perdu, mais pas celui des insouciants, pas celui qui nous fait vivre. En face jaillit le temps que les gens perdent sur Terre par stupidité, par manque d'initiative. Le temps gâché à cause de bureaucratie, des embouteillages. Tu comprends? C'est un temps destructeur, noir, qui dévore celui qui le subit."
Il faudra prendre ses responsabilités, choisir l'action, vivre sur l'île ou retourner à la vraie vie... pour ceux qui peuvent.
Et puis le livre est un roman, l'auteure le précise mais elle ajoute aussi qu'il s'agit d'une histoire racontée par Giulia: ce seraient ses souvenirs d'enfance. mais comment croire une telle chose? C'est trop merveilleux et angoissant? Silvana envoie des lettres à son amie, l’héroïne, pour l'informer de son avancée dans la rédaction de l'histoire. Elle doute, la questionne et rêve que l'île est vraie.
A travers ce conte, l'enfance se dévoile dans sa spontanéité, son indolence, son oisiveté (cf extrait), comme des qualités à préserver. Les adultes, qui les conservent, eux, sont encore des rêveurs, des découvreurs ou des mal adaptés. Le livre tente de faire un pont entre le merveilleux et le monde adulte, la paresse comme construction de soi, retour à soi et la vraie vie. C'est doux et chaud!
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