En ce moment des lectures comme des portraits. De magnifiques femmes, des tempéraments, des vies hors de ce que nous attendons d'elles.
Ici Marlène, aimée...
"Elle m'a parlé; très vite, elle m'a parlé, dans une langue comme neuve, qu'elle semblait se découvrir. J'écoutais. Elle ne me regardais pas, ne me touchais pas. Elle se laissait regarder; je ne la touchais pas. Je la buvais, sans la désirer comme désirent les hommes, avec le ventre. J'étais pris. Elle racontait, dans la lumière des après-midi, et le bruissement de la plage, troué de cris d'enfants. Elle racontait sa mère, sa grand-mère, ses sœurs, la boulangerie, le salon, et les hommes; le grand-père, Georges, son père. Elle disait avec une confiance assourdissante, donnée, comme pour toujours. Elle avait une voix grave, presque voilée, monocorde et ténue; une voix venue des longues steppes du silence et qui n'était pas de son âge. Chaque après-midi, je revenais. Elle ne semblait pas m'attendre et ne s'étonnait pas de me retrouver sous le parasol rayé de bleu. Nous ne nous baignions pas."
peut-être perdue...
"C'était un coup dans mon ventre, un nœud, un creux. C'était d'abord de la douleur, une question de corps. Il fallait se rassurer, continuer, attendre pour savoir, pour voir. Je ne me suis pas battu. Se battre comment. On n'a droit à rien. Chacun s'appartient, dans la solitude de sa peau. Je n'ai pas pleuré; devant elle. Je ne l'ai pas suppliée."
(extrait de "Le soir du chien" de Marie-Hélène LAFON, points)
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